Totto-chan est-elle la boule d’énergie adorable dont nous avions besoin pour bien commencer 2025 ? La réponse est oui ! N’essayez pas de résister à l’héroïne de ce film d’animation, vos efforts seraient vains. La petite Japonaise nous raconte ainsi ses aventures à travers ses rires et ses coups d’éclat de bienveillance et de générosité durant ce qui est probablement la pire période de son pays.
Totto-Chan : La petite fille à la fenêtre est un film d’animation de Shinnosuke Yakuwa, adapté du roman du même nom de Tetsuko Kuroyanagi. Figure historique du divertissement au Japon (elle anime depuis plus de 40 ans un talk-show quotidien à la télévision nippone !), l’artiste aujourd’hui âgée de 91 ans y raconte tout simplement son enfance.
Nous sommes donc transportés à Tokyo, au début des années 1940. Là, Tetsuko, petite fille pleine de vie que tout le monde appelle Totto-Chan, mène la vie dure à son institutrice, qui finit par la renvoyer.
Ses parents – lui premier violon, elle couturière – décident alors de l’inscrire à Tomoe, une école pas comme les autres où de vieux wagons font office de salles de classe. Son directeur y met l’accent sur l’indépendance et la créativité des enfants. Tandis que le Japon s’enfonce dans la guerre, Totto-Chan va découvrir que les petites expériences de la vie sont plus importantes que les leçons.
Totto-Chan la petite fille à la fenêtre : comme un vent de bonté
Il y a des personnages que l’on a envie d’aimer dès les premières secondes de nos rencontres. Totto-Chan est justement de ceux-là, elle qui a pourtant conscience que son énergie débordante peut désarmer. « Pourquoi tout le monde dit que je cause des ennuis ? » demande-t-elle-même à sa maman au début du film.
« Pourquoi tout le monde dit que je cause des ennuis ? »
Véritable tornade de bienveillance, son seul but est pourtant de faire disparaître les mauvais moments de la vie des autres. Par ses actes et ses paroles, ses gestes et ses attentions, elle veut simplement mettre de la couleur là où la noirceur du quotidien tente de faire grandir les nuages.
Alors elle prend soin de tout le monde, que ce soit un ami ou un poussin. Sourire aux lèvres et armée d’une volonté de fer, elle ne recule devant rien, même quand il s’agit de faire monter son camarade de classe handicapé dans un arbre. Le spectateur la regarde faire, parfois avec l’envie de lui dire que ce qu’elle tente est bien trop risqué. C’est pourtant bien elle qui finit par lui prouver qu’elle avait raison de se faire confiance. Tout ça avec une imagination qui défie toutes les idées noires.
Pas comme les autres
Totto-Chan est-elle différente des autres ? Non. C’est simplement une petite fille à l’imagination débordante. Shinnosuke Yakuwa nous transporte ainsi avec elle dans les délires de son esprit. Quand l’imagination prend le pas sur la réalité, le réalisateur la transforme alors en peinture aux teintes pastel rassurantes.
« Quand l’imagination prend le pas sur la réalité, le réalisateur la transforme alors en peinture »
La production du studio Shin-Ei Animation (derrière les films de la franchise Doraemon depuis plus de 40 ans, dont trois ont été réalisés par Yakuwa lui-même) est sublime, les scènes s’enchaînant comme des tableaux joyeux. Le wagon dans lequel se déroule la classe vous semble immobile ? Pas dans la tête de Totto. Elle, elle voit un lion sur son toit. Totto-Chan : la petite fille à la fenêtre réveille ainsi cet enfant que nous sommes nombreux à avoir été, curieux de ce qui se passe dehors. Dans son école pas comme les autres, il n’y a d’ailleurs que des enfants pas comme les autres.
Ode à l’acceptation de tous
Oui, dans le long-métrage, la différence est partout et les enfants apprennent ainsi qu’elle n’est nulle-part.
Ils l’acceptent tout simplement. « On est tous égaux. » est leur message. Le scénario du film met en avant la relation magnifique entre notre héroïne aux culottes courtes et Yasuaki, handicapé d’un bras et d’une jambe à cause de la poliomyélite : une maladie qui envahit le système nerveux et peut entraîner en quelques heures des paralysies irréversibles. Totto le pousse dans ses retranchements pour que, lui aussi, puisse oublier, ne serait-ce que quelques minutes, combien sa vie est dure.
Dans la classe de la petite Japonaise, on se serre les coudes et on se soutient coûte que coûte. Ce n’est pas tous les jours facile car l’humain n’est pas toujours prêt à accepter ce qu’il ne comprend pas, mais on fait de son mieux avec son regard d’enfant. Et quand les obstacles ne sont pas personnels, rien n’y fait, il faut quand même les combattre.
La tempête avant la tempête
Totto-Chan : la petite fille à la fenêtre commence dans l’insouciance du Japon de 1940 et se termine en 1945, alors que Tokyo est à feu et à sang. Nous voyons ainsi ce monde enchanteur qu’est celui de la jeune fille se ternir inexorablement avant d’exploser sous les bombes. Son pays se ferme alors peu à peu à l’Occident, durcit sa vision du conflit pour commettre l’irréparable et le payer de la manière la plus effroyable qui soit.
Le long-métrage nous montre ainsi comment tout change en quelques années, mais à hauteur d’enfant. Bouleversant, il nous dévoile la dureté d’un monde en guerre et certaines séquences très dures nous rappellent même celles du film Le Tombeau des lucioles de Isao Takahata. Autant dire que l’on ne fait pas que sourire durant notre visionnage et c’est aussi ce qui rend l’œuvre de Shinnosuke Yakuwa aussi unique et réussie.
Sous les pétales de rose et les jeux enfantins baignés d’insouciance se cache la vie, éternel jeu de pile ou face qui promet rires et larmes. Totto-Chan : la petite fille à la fenêtre est un film humain et bienveillant, comme son héroïne que, même le générique terminé, nous n’avons plus envie de quitter.
L’amour dont elle fait preuve nous rappelle aussi celui que l’on donne et que l’on reçoit. Bulle de bienveillance, de générosité et d’espoir, le long-métrage fait une entrée aussi douce que fracassante sur la liste des films d’animation japonais à regarder avec bonheur chaque année à Noël.
Distribué par Eurozoom, Totto-Chan : la petite fille à la fenêtre est à découvrir au cinéma en France dès le 1 janvier 2025. Toujours à l’affiche, ne passez pas non plus à côté de My Sunshine.
– Stéphane Hubert