Des carottes emballées individuellement, des bananes sous un double emballage plastique, 3 champignons dans une barquette sous cello, le Japon est bien un enfant de la société de consommation. Le sur-emballage est partout. Un produit sera souvent emballé sous plusieurs couches protectrices pour être sûr qu’il ne s’abîmera pas, le plus souvent pour parfaire sa présentation dans une logique commerciale. De tels gaspillages engendrent forcément des quantités de déchets colossales. Et malgré leur système de tri sélectif, les autorités du pays ont bien du mal à éliminer cette masse de déchets plastiques qui ne cesse de croître. Moralité, tout est le plus souvent incinéré…

C’est un triste phénomène dont on entend de plus en plus parler : le 7ème continent de plastique qui s’est formé dans le Pacifique, une « soupe » composée de milliards de fragments de plastique. Un des symptôme visible de la folie de la société de consommation. Ils menacent la faune et la flore marine mais aussi l’Homme, car les plus petits morceaux sont absorbés par les poissons qui seront ensuite pêchés pour notre consommation. De telles concentrations existent par ailleurs dans l’Atlantique nord, sud et de l’océan Indien. Le résultat d’un demi-siècle de rejet de déchets plastiques dans les océans que les courants marins ont ensuite rassemblés. Mieux vaut tard que jamais, les pays industrialisés ont lentement pris conscience de la gravité de ce phénomène. Des mesures pour lutter contre cette pollution commencent à voir le jour et les citoyens du monde entier, dont des Japonais, se mobilisent. Car la production mondiale de plastique ne cesse de croître et la pollution avec elle.

3 plastiques pour un simple snickers

Au Japon, conscientes de la nécessité de recycler les déchets, les autorités nipponnes ont  mis en place depuis 1997 un système de collecte et de tri strict. L’archipel arrive ainsi à recycler un cinquième de ses déchets plastiques (ce qui reste encore très peu). Mais sachant que la consommation annuelle de plastique dans l’archipel atteint les 9,64 millions de tonnes, les quantités de déchets qui sont traitées dans les centres de recyclage sont édifiantes. Ainsi, au centre de Ichikawa Kankyo Engineering près de Tokyo c’est dix tonnes de plastiques qui arrivent chaque jour pour être recyclées. Un centre, un jour, dix tonnes ! Rien d’étonnant à cela, les japonais vouent un véritable culte pour le plastique depuis leur révolution industrielle. Il est présent partout et largement utilisé avec une durée de vie moyenne de quelques minutes. Pots de ramen, pailles jetables, sacs dans les konbini, sacs à parapluie devant chaque magasin, suremballage inutile des produits, magasins à 100 yens, le plastique est omniprésent. Certains magasins vont jusqu’à emballer séparément les produits achetés, quand la viande, déjà sous cellophane, n’est pas ré-emballée dans un petit sac supplémentaire. On est jamais trop prudent !

Quant au reste, le Japon l’exporte vers la Chine, 72% en 2017 d’après le reportage « Close-up Gendai » de la NHK en mai. Pendant des décennies la République populaire a acheté des déchets plastiques au monde entier pour les recycler, servant ainsi de poubelle bien pratique aux États-Unis, à l’Europe et au Japon donc. Mais en juillet 2017, la Chine a annoncé vouloir mettre fin à cette importation massive, désirant se concentrer sur le traitement de sa propre production de déchets en hausse grâce à la consommation d’une nouvelle classe moyenne. Une mesure définitivement actée le 11 janvier dernier avec la publication de ses nouveaux standards d’acceptabilité.

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Un défi de taille se profile donc pour le Japon (et les autres pays industrialisés) qui ne peut plus désormais s’y débarrasser facilement de ses poubelles plastiques. De nombreux de centres de stockage ont d’ores et déjà atteint leur limite et le temps presse pour traiter ce surplus. Du coup, le Japon envisage de vendre ses déchets à la Thaïlande mais un bureaucrate thaïlandais annonce qu’il ne peut s’agir que d’une solution provisoire (de plus cela ne règle pas le problème de la sur-consommation en amont). Autre paramètre non-négligeable : les coûts d’exportation qui vont s’envoler à terme.

Pour limiter l’accumulation de ces déchets, le pays entend également se tourner vers des techniques de recyclage plus efficaces permettant de fabriquer une gamme plus large de produits. Mais le plus souvent, ce plastique est utilisé comme combustible. Une solution peu viable toutefois et également émettrice de pollution atmosphérique. Localement, certaines autorités n’attendent plus. La préfecture de Miyagi a choisi de subventionner les entreprises qui transforment leurs déchets plastiques. Mais ces initiatives ont un effet pervers : car le plastique recyclé sera à son tour un jour un déchet à traiter de nouveau, un cycle sans fin qui s’auto-alimente. De plus, le recyclage du plastique coûte beaucoup plus cher que sa production. Alors le gouvernement pourrait aussi se pencher sur la législation qui ne contrôle pas encore l’emploi des sacs ou d’objets en plastique à usage unique, penser à des campagnes enfin efficaces pour inciter les Japonais à réduire leur consommation, voir instaurer des pénalités dissuasives. De manière générale, très peu de Japonais se soucient de l’impact de leur consommation à ce jour. L’idée est très répandue dans la population que le gouvernement gère très bien le recyclage des déchets…

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Pour finir sur une note optimiste, en 2007, des chercheurs japonais ont mis au point des coques pour téléphone en plastique « végétal », fait en polymères biodégradables semblables à ceux dont on enrobe les médicaments. Une utilisation qui s’est étendue à d’autres appareils électroniques : télévision, toner de photocopie et aux emballages. Une innovation encourageante qui gagnerait à s’étendre et pas seulement au Japon (carton rouge par contre aux plastiques soit-disant biodégradables qui en réalité ne le sont pas !). Les solutions ne manquent pas, restent les volontés et surtout des pouvoirs publics à mobiliser. Un véritable défi pour une population relativement passive sur le plan politique.

S. Barret


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Sources : japantimes.co.jp / asiepacifique.fr / consoglobe.com / fresques.ina.fr / lemonde.fr