Il y a des amours qui traversent les époques, endormis, attendant patiemment de se réveiller. Dans « Nabbie’s Love », c’est par un ferry qu’il revient pour bouleverser le calme d’une petite île japonaise bien paisible. Notre avis sur un film magnifique.
Nabbie’s Love est un film écrit et réalisé par Yuji Nakae en 1999.
Nous y suivons Nanako, une jeune Japonaise qui quitte son emploi à Tokyo pour retourner sur son île natale, où vivent encore son grand-père, Keitatsu, et sa grand-mère, Nabbie. Ici, la vie est paisible, sans remous. Pourtant, l’arrivée d’un homme venu du passé commence à faire mettre à mal le bel équilibre sur lequel se maintient le village. Le comportement de Nabbie change même soudainement. Devenue bien mystérieuse et imprévisible, elle a un nouveau plan d’avenir en tête. Autour d’elle, ses proches essaient de trouver les indices pour comprendre lequel.
Okinawa, beautés et tradition

Dès les premières minutes du film, nous comprenons que Nabbie’s Love possède une première particularité. Tout se passe en effet sur l’île d’Aguni. Située à 60km à l’est de Naha, elle mesure moins de 8km² et vous n’y trouverez ni bar, ni restaurant, ni taxi, ni bus. Elle est quand même reliée au « continent » par un ferry et un minuscule aéroport.
Paradis des amoureux de plongée, c’est un lieu préservé à la nature belle et luxuriante. Ce choix de toile de fond par le réalisateur confère au film un charme certain. Tout y est authentique, tout le monde connaît tout le monde. Les habitants y évoluent comme dans une bulle qui protègerait ce village des turbulences de l’extérieur.
Et c’est justement cet « autre monde » qui va s’inviter par la voie des mers et en bouleverser la quiétude.
Nabbie’s Love : un amour plus fort que le temps

Nabbie et Keitatsu sont mariés depuis des décennies. Tout semble roulé autour d’eux alors que la routine s’est installée. Ils sont établis dans ce village, des figures positives et souriantes. Le bonheur, pourrait-on presque dire. Pourtant, dans le cœur de Nabbie, il y a une porte qu’elle n’a jamais fermée. Une seule personne a le droit d’y entrer et la Japonaise attend patiemment son retour. Ce personnage est d’une grande douceur, mais aussi d’une force et d’un courage admirable. On sent en effet que celle qui est aujourd’hui une vieille dame n’en reste pas moins une femme qui a caché une fraction de son amour pour l’offrir un jour à un autre. Le jeu tout en sobriété et en finesse de l’actrice Tomi Taira est pour beaucoup dans l’attachement que nous portons à son personnage.
Elle nous apprend ainsi qu’il n’est jamais trop tard pour connaître le grand amour. Pour d’autres, il est par contre parfois beaucoup trop tôt !
Pas de faux bonheur par défaut…

Sa petite-fille Nanako est en effet elle aussi au centre d’un dilemme. Oui, Keiji, son ami d’enfance n’arrête pas de lui faire des avances et lui promet qu’elle sera heureuse avec lui. Cependant, la jeune femme n’éprouve pas vraiment d’amour pour lui. Surtout, elle ne veut pas aimer par défaut. Quand elle voit le romantisme qui se terre depuis des décennies dans le cœur de sa grand-mère, elle comprend ce qu’est le véritable amour. Le trouvera-t-elle dans les bras de Funosuke ?
Nabbie’s Love nous montre ainsi la quête de plusieurs femmes qui veulent, tout simplement, être les plus heureuses possibles. Même si elles doivent parfois s’éloigner de l’affection sincère de certains de leurs prétendants.
Destins croisés et destin brisés

Le scénario de Yuji Nakae est écrit avec une belle pudeur, sans jugement de ses personnages. Le réalisateur arrive en effet à justifier chaque décision prise, que ce soit celles de Nabbie ou de Nanako, quelles que soient les conséquences qu’elles ont sur la vie de leurs proches.
Oui, nous sommes simplement face à une histoire humaine, avec des passés qui ont retardé des bonheurs. Il est donc important que le présent puisse rattraper les erreurs et les errances d’hier pour que l’avenir soit plus heureux. N’est-ce pas ce à quoi nous aspirons tous ?

Nabbie’s Love est l’histoire d’une seconde chance offerte par le destin à un couple qui ne pensait jamais en devenir un. Cette belle histoire est également très drôle et forte d’une bande-originale mêlant chant traditionnel d’Okinawa, shamisen et violon irlandais. Tout cela est plus que charmant, gorgé de sincères et beaux sentiments et parfait pour être dévoré en ce début d’été.
Tout comme le très réussi Ito, Nabbie’s Love est à découvrir gratuitement en streaming sur le site du Japan Film Festival.
Stéphane Hubert
















































