Avez-vous la moindre petite idée du fonctionnement des partis politiques au Japon et des idées qu’ils défendent ? Peu probable. Avec une abstention historique et un désintérêt général envers la politique, les Japonais eux-mêmes s’intéressent très peu à ces questions, laissant à un vieux monde politique inchangé depuis des décennies le soin de gérer le pays sans trop se poser de questions. Devant cette lassitude qui se traduit par une abstention record et le sentiment de n’avoir aucun pouvoir, un jeune collectif a décidé de faire bouger les lignes en éclaircissant les idées de chaque parti : ceux-ci sont invités à assumer leurs laveurs à travers une cinquantaine de questions déterminantes. Comme vous pouvez vous en douter, les réponses de certains partis les plus influents sont parfois déconcertantes…
Deux jours seulement après le décès de Shinzo Abe, tué ce matin par un tireur à bout portant, ont eu lieu les élections de la chambre des conseillers au Japon, durant laquelle étaient appelés aux urnes les citoyens et citoyennes afin d’élire les conseillers de la chambre haute. Un peu comme pour les législatives en France, il s’agit d’un moment important de la vie politique qui détermine l’orientation de l’avenir du Japon pour les années à venir.
Et pourtant, les jeunes Japonais se sont très peu intéressés à cet évènement. C’est dans ce contexte qu’un collectif de citoyens japonais « engagés » issus de différents milieux a lancé une initiative visant à poser 43 questions pour le futur de la nation. Miracle : tous les partis se sont prêtés au jeu les uns après les autres, ce qui nous offre une photographie claire de leurs idées. Le but de la manœuvre est d’encourager la population à aller voter à la lumière d’explications détaillées et plus accessible sur des sujets de préoccupations majeures… Comme on peut s’en douter, les réponses de certains partis sont tout juste hallucinantes, en particulier celles de la majorité conservatrice au pouvoir depuis des décennies.
En préambule, le collectif appel invite les Japonais à une réflexion profonde sur la nécessité de l’engagement politique en ces temps d’incertitude à l’échelle globale. La nécessité d’une réflexion profonde et d’un dialogue est mise en avant, rappelant que rien n’est immuable en ce bas monde et que l’espoir reste permis. Mais ce changement devra attendre, la majorité conservatrice au pouvoir vient une nouvelle fois de remporter les élections. Mais qui sont-ils ? Que pensent-ils ? Avant d’aller plus loin, voici une liste des différents partis japonais et leur histoire afin de contextualiser leurs réponses.
Présentation des partis questionnés
Le Parti libéral-démocrate (自由民主党, Jiyūminshutō) est la principale force politique du pays, ayant été au pouvoir sans discontinuer (mis à part en de très courtes et rares occasions depuis sa création en 1955). C’est un parti de droite conservateur à forte tendance nationaliste dont est issu le célèbre ancien Premier ministre Shinzo Abe, qui fut en exercice une première fois de septembre 2006 à septembre 2007, puis de décembre 2012 à septembre 2020.
Après sa démission pour raison de santé lui succédèrent Yoshihide Suga, puis l’actuel Premier ministre Fumio Kishida, tout deux issus de la même formation politique. Nous invitons donc le lecteur à bien analyser les réponses de ce parti aux différentes questions posées par le collectif, étant la principale force politique du pays. Ce sont eux qui mènent la vie politique de l’archipel depuis « toujours » et viennent de remporter une fois encore les élections.
Le Parti démocrate constitutionnel (立憲民主党, Rikken Minshutō), fondé en 2017 sur les cendres de l’ancien Parti démocrate, est le principal parti d’opposition et se situe sur le centre-gauche de l’échiquier politique. Fervent défenseur du pacifisme inscrit dans la constitution japonaise, leur vision est sociale-libérale et prône la sortie du nucléaire civile ainsi que le progressisme social. Ses membres sont très critiques de la haute administration d’État actuelle. Seulement 44 conseillers sur 245 actuellement. Autant dire que l’opposition ne pèse pas lourd au Japon.
Le Parti communiste japonais (日本共産党, Nihon kyōsantō), classé extrême gauche, fondé en 1922, restera clandestin jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, vit son interdiction être levée sous l’occupation américaine. Il est à ce jour l’un des plus grands partis communistes d’opposition au monde avec ses plus de 270 000 membres. S’opposant au nucléaire civil, il bénéficia d’un tremplin électoral au lendemain de la catastrophe de Fukushima. Leur credo est la mise en place d’une société socialiste en opposition au capitalisme, se voulant le parti des travailleurs et des précaires, en faveur de la justice sociale. Le parti est d’aspiration Léniniste, bien qu’adhérent à une idée de révolution démocratique, et ayant formellement renoncé au principe de « dictature du prolétariat » depuis 1976. 13 conseillers sur 245 actuellement.
Le Parti social-démocrate (社会民主党, Shakai Minshutō) est un parti assez récent, fondé en 1996 à la suite d’une transformation de l’ancien Parti socialiste japonais. Ce parti est situé à gauche du spectre politique et est membre de l’internationale socialiste, et entretien d’excellents rapports avec le Parti socialiste français. Celui-ci est en chute libre depuis sa création, phénomène s’expliquant par la désertion de ses militants au profit du Parti démocrate sus-cité. Seulement 2 conseillers sur 245 actuellement.
Le Parti de l’innovation japonais (Nippon Ishin no Kai), fondé en novembre 2015 d’abord sous le nom « Initiatives d’Osaka » suite à une fusion avec le Parti de l’innovation japonais. Il a été créé par Ichiro Matsui alors gouverneur d’Osaka, et Toru Hashimoto, à cette époque maire d’Osaka. Le parti se situe à droite, mais est perçu par l’opinion publique comme « centriste et modéré », soutenant entre autre la légalisation du mariage entre personnes du même sexe, la gratuité de l’éducation ou encore une baisse de la TVA. Actuellement, le parti dispose de 15 conseillers.
La Parti démocrate du peuple (国民民主党, Kokumin Minshu-tō), est un parti de droite-centre droite donné en 2018, dans le but avoué de tenter de devenir la principale force d’opposition à la diète. Se voulant une synthèse entre un nationalisme conservateur et constitutionnalisme pacifique, le parti a jusqu’alors échoué dans son objectif premier, à savoir s’opposer frontalement au PLD représenté à l’époque par Shinzo Abe. On retrouve chez ce parti les thématiques de la critique de la haute administration nationale, et la volonté de faire sortir le paix du nucléaire civil, et en repensant les besoins militaires du pays dans une approche pragmatique d’organisation de la défense de celui-ci. Ce parti dispose de 12 conseillers sur 245 (et une belle mascotte…).
Le Parti du gouvernement éclairé (公明党, Kōmeitō), fondé en 1964, applique les principes religieux du bouddhisme à la politique nationale, en se revendiquant de « démocrates bouddhistes » que l’on pourrait pour plus de compréhension comparer aux partis « chrétiens-démocrates » en occident. Plutôt au centre, ce parti se veut le défenseur d’un « socialisme » basé sur l’humanisme et le respect de la vie humaine, défendant par la même la notion de pacifisme constitutionnel du pays et l’élimination des armes nucléaires de par le monde. Ceux ci disposent de 28 conseillers sur 245.
Le Reiwa Shinsengumi (れいわ新選組). Fondé en 2019 par l’acteur converti à la politique Taro Yamamoto, ce parti « populiste » de gauche s’inscrit dans une idéologie progressiste et lui aussi, fermement anti-nucléaire (nous pouvons ici noter que la politique japonaise porte les stigmates de la catastrophe de Fukushima). Parti très récent, il milite activement pour créer des lois protégeant les droits animaux et porter le salaire minimum à 1500 yens de l’heure (là où la moyenne est très volatile selon les régions, stagnant à peu près à 950 yens de l’heure). Ils se sont donné pour mission de faire abolir certaines lois promulguées sous le mandat de Shinzo Abe, comme la controversée législation militaire de 2015. Le très jeune parti dispose à l’heure actuelle de 2 conseillers sur les 245.
Des questions / réponses importantes
Maintenant que nous sommes éclairés sur ces principaux partis politiques Nippon et de leur représentativité, voici un bref récapitulatif de leurs réponses sur une présentation non exhaustive de 6 questions clés parmi les 43 qui ont été posées par le groupe de volontaires de « Minna no Mirai » (le futur de tous). Nous invitons les plus anglophones d’entre vous à consulter la source pour accéder à toutes les questions.
Concernant la méthodologie utilisée par le collectif : les partis ont répondu soit par MARU (soit un « O » pour réponse affirmative), BATSU (soit une croix « X » pour une réponse négative), ou une simple barre horizontale » – » (si ceux-ci ne se prononcent pas sur la question). Le tout est assorti d’un argumentaire de chaque parti expliquant synthétiquement leur choix retranscrit à l’écrit, que nous vous traduisons ici.
Voici les points sur lesquels nous souhaitons attirer votre attention :
Section sur l’alimentation et l’agriculture, question 2 :
« De nombreux additifs alimentaires dont l’utilisation est actuellement autorisée au Japon ont été interdits ou limités dans d’autres pays en raison des risques qu’ils présentent.
Pensez-vous que la réglementation actuelle sur les additifs alimentaires est suffisante ? »
Partis ayant répondu « O » pour Oui :
Parti libéral démocrate : « La désignation des additifs alimentaires est basée sur l’évaluation de la sécurité, sur demande de ceux qui ont l’intention de vendre. Nous sommes conscients que le système de désignation aux États-Unis et dans l’UE est fondamentalement le même qu’au Japon. » Le PLD (droite nationaliste au pouvoir) nie globalement la question et estime que la réglementation actuelle est suffisante.
Komeito :Compte tenu des préoccupations du public concernant les additifs alimentaires, nous pensons que nous devrions fournir des informations par le biais de la communication directe, comme les ressources d’information sur la sécurité, etc. et un étiquetage facile à comprendre des additifs utilisés dans les produits alimentaires. Cela dit, nous pensons que le Japon réglemente également les additifs alimentaires en fixant des normes appropriées, telles que la confirmation de l’efficacité et des effets sur la santé et la garantie de la sécurité lorsque de nouveaux additifs alimentaires sont utilisés, ou lorsque des additifs alimentaires déjà disponibles sont destinés à être étendus en termes d’utilisation.
Tous les autres partis ont répondus par « X » pour NON :
Tous ces autres partis sont d’accords pour prohiber certains additifs en s’appuyant sur les avancées scientifiques et les constations faites dans les autres pays.
Pour le parti communiste : « Nous pensons que nous devrions examiner rigoureusement et fixer des normes strictes pour les additifs alimentaires, non pas dans l’intérêt des entreprises alimentaires ou de l’expansion du commerce, mais dans le but de protéger la vie et la santé du peuple japonais. »
Entre autres réponses intéressantes, celle du parti démocrate du peuple : « Afin d’établir un système permettant de fournir des produits agricoles et des aliments sûrs, nous devrions étendre le champ d’application de l’étiquetage de l’origine des matières premières à tous les aliments transformés, ainsi que promouvoir la traçabilité des aliments, les additifs alimentaires, l’étiquetage des aliments génétiquement modifiés, et les informations sur les allergies, l’étiquetage des produits alimentaires modifiés par le génome, et d’autres contenus d’étiquetage pour répondre à la diversification des produits, et réaliser un système d’étiquetage des aliments du point de vue du consommateur. » (Note : ce point est en parti déjà en vigueur en France avec l’affichage de l’origine et le système de numéro vétérinaire/ abattoir etc)
Section sur l’éducation, question numéro 3 :
« Le ministère de l’éducation, de la culture, des sports, des sciences et de la technologie (MEXT) promeut « l’éducation à la sécurité de la vie (Inochi no anzenkyoiku) » qui enseigne le consentement et les limites afin de protéger les enfants de la violence sexuelle. Cependant, cette directive comporte une directive de contrôle appelée Hadome Kitei qui empêche les écoles d’enseigner les rapports sexuels réels ou le processus de grossesse. En raison de cette restriction, le programme Life’s Safety Education ne permet pas aux élèves d’acquérir une connaissance et une compréhension suffisantes de la sexualité.
Avez-vous l’intention de lever cette restriction et de promouvoir une éducation sexuelle complète qui apprend aux enfants à respecter les droits de l’homme, sur la base de preuves scientifiques ? »
Parti ayant répondu par la négative « X » :
Parti libéral démocrate : « L’éducation sexuelle doit tenir compte des stades de développement des élèves et doit reposer sur une compréhension commune à toute l’école, ainsi que sur celle des parents et de la communauté. Nous ne leur permettrons pas d’enseigner une éducation sexuelle inappropriée ou une éducation non genrée. » Sans surprise, le parti conservarteur au pouvoir s’oppose à l’éducation sexuelle qu’elle juge inappropriée. Pourtant c’est cette absence d’éducation basique qui est une cause principales des comportements sexuels déplacés des jeunes garçons envers les filles.
Partis ayant formulé une réponse « Autre » :
Parti démocrate du peuple : « Nous créerons un environnement où les droits de l’homme sont respectés et où les écoles et les communautés soutiennent le développement des enfants par la vie scolaire, les cours en classe, l’éducation sexuelle et l’éducation sur les périodes menstruelles, et où les écoles et les communautés coopèrent pour accompagner les enfants dans leur croissance. »
Komeito : « Dans les cours d’éducation physique et de santé pour les élèves de première année de collège, en apprenant le développement des fonctions mentales et physiques et la santé mentale, les élèves apprennent les changements du corps pendant la puberté, auxquels de nombreux élèves sont confrontés, afin qu’ils puissent comprendre que les systèmes reproducteurs se développent et que la grossesse devient possible pendant la puberté. Les directives du ministère en matière de programmes scolaires ont été révisées en 1998, car ces éléments étaient alors enseignés par le biais d’une éducation sexuelle radicale (par exemple, en illustrant les rapports sexuels). Le Hadome Kitei a alors été créé et il est toujours en vigueur à ce jour pour restreindre ces enseignements radicaux qui ne tiennent pas compte des stades de développement des élèves. Nous allons promouvoir « l’éducation à la sécurité de la vie » afin qu’elle soit mise en œuvre dans davantage d’écoles pour protéger les enfants contre les crimes et les violences sexuelles. »
Tous les autres partis ont émis un avis favorable et s’accordent sur la nécessité d’une éducation sexuelle adaptée aux recommandations de l’UNESCO de 2009 sur le sujet, déjà appliqué par de nombreux pays européens. Toutefois, les réponses de deux partis donnent des indications intéressantes :
Le parti démocratique constitutionnel : Nous promouvrons une éducation sexuelle complète en tant que droit de l’homme dans l’éducation scolaire et sociale, où les hommes et les femmes peuvent acquérir des connaissances correctes sur la sexualité afin d’éviter qu’ils ne deviennent des auteurs ou des victimes de violences sexuelles.
Le parti communiste nous livre une réponse très détaillée avec un historique fort instructif : La révision de 1992 des directives officielles relatives au programme d’études a permis de passer à l’enseignement de la « sexualité » aux élèves de l’école primaire. Cependant, dans la révision de 1998 des directives officielles sur les programmes scolaires, une « interdiction d’enseigner le processus de la grossesse » a été ajoutée, et en 2003, les membres du LDP de l’assemblée métropolitaine de Tokyo et d’autres personnes sont intervenus dans l’éducation sexuelle à l’école métropolitaine de Tokyo Nanao pour l’éducation des personnes ayant des besoins spéciaux, et les membres du LDP de la Diète se sont joints au dénigrement de l’éducation sexuelle, ce qui a rendu les écoles réticentes à reculer sur l’éducation sexuelle. En conséquence, de nombreux enfants souffrent de nombreux problèmes et questions qui se font du mal physiquement et mentalement sans avoir aucune connaissance sur le sexe. Le Comité des droits de l’enfant des Nations unies recommande au gouvernement japonais de « veiller à ce que l’éducation sexuelle et reproductive des adolescents, filles et garçons, soit systématiquement enseignée dans le cadre du programme scolaire obligatoire. Nous pensons qu’il est absolument nécessaire d’éliminer le contrôle « Hadome Kitei » et de promouvoir une éducation sexuelle complète. Nous, le Parti communiste japonais, sommes un parti politique dont l’énoncé de mission est de « créer une société égalitaire entre les sexes ». Tout en respectant les droits de l’homme et l’égalité des sexes, nous proposons la promotion d’une éducation sexuelle complète, comprenant des connaissances scientifiques sur la physiologie humaine, la reproduction et la contraception, la diversité sexuelle, la manière de construire des relations mutuellement respectueuses et la manière de se protéger des choses qui nuisent à son esprit et à son corps.
Section sur les minorités sexuelles, question numéro 1 :
« Allez-vous promulguer une « loi sur l’égalité des LGBT » qui interdit explicitement la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre ? »
Parti ayant répondu négativement :
Parti libéral démocrate : « Plutôt que d’interdire la discrimination, nous favoriserons une compréhension large et correcte des minorités sexuelles et construirons une société tolérante et chaleureuse qui embrasse la diversité. » Sans surprise, le PLD s’y oppose avec une réponse contradictoire et réactionnaire. Comment construire une société tolérante alors que les lois conservatrices sont systématiquement intolérantes envers les minorités ?
Tous les autres partis ont répondus positivement sans exception, même le parti religieux, soulignant le caractère inacceptable de ce type de discrimination.
Section sur les minorités sexuelles, question numéro 2 :
« Allez-vous légiférer sur le mariage homosexuel ? »
Unique parti ayant répondu par la négative est une fois encore le Parti libéral démocrate au pouvoir : « La position du gouvernement, ainsi que celle de notre parti, est que « l’article 24 de la Constitution stipule que le mariage doit être fondé uniquement sur le consentement des deux sexes et que dans le cadre de la Constitution actuelle, il n’est pas envisagé que les couples de même sexe soient autorisés à se marier« . Le « système de partenariat » adopté par certains gouvernements locaux repose sur l’hypothèse d’une meilleure compréhension de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre par le public, et nous pensons qu’un examen attentif, y compris des avantages et des inconvénients d’un tel système, est nécessaire. »
Tous les autres partis y ont répondu favorablement sans exception, invoquant les droits fondamentaux à épouser et vivre dignement avec la personne de son choix, avec une réponse détaillée du parti démocrate du peuple : « Le mariage entre personnes de même sexe est reconnu dans 29 pays et régions du monde. Et le Japon est le seul pays du G7 qui ne dispose pas d’une loi garantissant le partenariat entre personnes de même sexe. Nous allons promouvoir la législation visant à résoudre les problèmes liés à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre, notamment en envisageant l’expansion et la législation du système de partenariat et en assouplissant les exigences relatives à la modification des registres de famille. »
Section contre la violence sexuelle / réforme du code pénal, question 1 :
« L’âge de consentement est l’âge minimum à partir duquel une personne est considérée comme capable de consentir à un rapport sexuel. Au Japon, l’âge du consentement n’a jamais été révisé depuis qu’il a été établi dans le code pénal pendant l’ère Meiji, et il est plus bas que dans d’autres pays.
Allez-vous faire passer l’âge du consentement de 13 à 16 ans ? »
Partis ayant donné une réponse « autre » :
Parti libéral démocrate : « Le ministre de la Justice a consulté le Conseil législatif du ministère de la Justice en septembre 2021 concernant l’établissement de lois pour traiter les crimes sexuels, et le Conseil délibère actuellement sur la question. Nous agirons en fonction des résultats. » Historiquement, le PLD n’a jamais vraiment été intéressé par la question de l’âge du consentement sexuel.
Komeito : « Visant l’éradication des crimes et violences sexuels, nous encouragerons les efforts visant à relever l’âge de consentement pour les rapports sexuels. En ce qui concerne l’âge de consentement, nous continuerons à discuter soigneusement de la question avec chaque parti et chaque faction, et nous ferons tout notre possible pour former un large consensus. » Komeito propose donc une réponse « ni-pour / ni-contre » malgré un discours qui semble favorable.
Seul parti ayant donné une réponse négative :
Parti de l’innovation : Nous devrions relever l’âge de consentement pour les rapports sexuels, mais un consensus national est nécessaire pour savoir s’il faut ou non porter cet âge à 16 ans.
Tous les autre partis ont répondu positivement, avec une réponse très détaillée du parti communiste qui dresse un constat grave :
« L’âge du consentement au Japon est trop bas, ce qui est un signe que la société dans son ensemble ne reconnaît pas l’importance de protéger les enfants contre les atteintes sexuelles, et c’est une honte. La victimisation sexuelle et les abus sexuels à la maison et à l’école sont graves, mais les effets néfastes sur les enfants sont durables, car il est difficile pour eux et leur entourage de reconnaître les dommages, et il leur faut beaucoup de temps pour s’en remettre. Compte tenu de la gravité des agressions sexuelles sur les enfants, il est impératif de relever l’âge de l’agression sexuelle. Des mesures législatives peuvent être prises, comme la fixation d’une règle de différence d’âge et la non-dépénalisation des actes sexuels entre personnes du même groupe d’âge de plus de 13 ans. Il y a deux ans, la Corée du Sud a également relevé l’âge du consentement de 13 à 16 ans, et le retard du Japon ne peut être négligé. »
Section sur les centrales nucléaires, question numéro 3 :
« Êtes-vous d’accord avec le rejet dans l’océan de l’eau contaminée générée par le réacteur nucléaire Fukushima Daiichi ? »
Deux partis ont répondus Oui :
Le parti libéral démocrate : La principale prémisse du rejet en mer de l’eau traitée par ALPS est de respecter les règles internationales et de garantir une sécurité totale. En outre, nous prendrons les mesures nécessaires telles que des explications minutieuses à toutes les parties concernées, y compris les personnes travaillant dans le secteur de la pêche, la prévention des atteintes à la réputation en favorisant la compréhension grâce à des mesures de sécurité approfondies et à la diffusion d’informations, etc., le soutien aux pêcheurs, etc.
Le parti de l’innovation : Tout d’abord, il ne s’agit pas d’eau contaminée mais d’eau traitée par le système ALPS (Advanced Liquid Processing System). Il n’y a aucun problème pour diluer et évacuer l’eau afin de respecter les normes de rejet en mer. Et il y a un certain nombre de pays qui ont rejeté plus de tritium que l’eau traitée que Fukushima stocke. Cependant, nous devrions également mettre en œuvre des contre-mesures pour éviter les dommages à la réputation.
Deux partis ont donnés une réponse « autre » :
Parti démocrate du peuple : La reconstruction et la revitalisation de Fukushima resteront la question la plus importante, et nous consacrerons toutes les mesures politiques pour faire avancer le démantèlement, etc. de la centrale nucléaire Fukushima Daiichi de TEPCO vers la « reconstruction et le démantèlement ». Nous prendrons des mesures spécifiques concernant la manipulation de l’eau traitée par l’ALPS. Nous ferons tout notre possible pour résoudre les nombreux problèmes laissés par le grand tremblement de terre du Japon oriental, y compris des mesures approfondies contre les dommages à la réputation, une indemnisation rapide, et la reconstruction et le développement industriel dans les zones touchées.
Komeito : Le projet du gouvernement n’est pas de rejeter directement dans l’océan l’eau contaminée produite par la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi, mais de la purifier à l’aide de l’ALPS, puis de la diluer avec de l’eau de mer afin de ramener la concentration de tritium à environ un quarantième de la norme nationale et un septième de la norme de l’OMS pour l’eau potable. Le gouvernement affirme qu’il n’y a pratiquement aucune possibilité d’affecter l’environnement ou la santé humaine. En outre, le gouvernement prévoit d’assurer la surveillance et la transparence par des tiers tels que des organisations internationales, y compris la coopération avec l’AIEA, sur le rejet des eaux traitées dans l’océan. Le gouvernement devrait prendre l’initiative et l’entière responsabilité du rejet des eaux usées traitées dans l’océan et devrait travailler de bonne foi pour obtenir la compréhension des personnes travaillant dans la pêche et du public, et prendre toutes les mesures possibles pour assurer la sécurité. Nous pensons également que le gouvernement devrait travailler sur des mesures de soutien pour prévenir les dommages à la réputation.
Sur ce point, les 4 autres partis on répondu « Non » et s’accordent sur l’impact écologique possible.
Deux de ces partis développent :
Le parti communiste : Après le traitement de l’eau radioactive, il reste de fortes concentrations de tritium et d’autres substances radioactives. La Japan Fisheries Co-operative a fait savoir au Premier ministre, en avril de cette année, que le président de la JF était toujours fermement opposé à ce projet. La libération de l’eau radioactive rompt la promesse faite par le gouvernement au secteur de la pêche de ne pas libérer l’eau sans l’accord de toutes les parties concernées. Il saperait les efforts de reconstruction déployés à Fukushima au cours des dix dernières années, et plus de 70 % des gouvernements locaux de la préfecture de Fukushima, ainsi que ceux des préfectures d’Ibaraki, de Miyagi et d’Iwate, ont exprimé leur opposition. Nous devons abandonner notre politique de rejet des eaux usées dans l’océan et rechercher une solution acceptable pour toutes les parties concernées en faisant preuve de sagesse tout en prenant des mesures telles que la construction de réservoirs supplémentaires.
Le parti sociale démocrate : Le déversement d’eau contaminée dans l’océan pourrait causer des dommages irréversibles et avoir un impact non seulement sur le Japon mais aussi sur la communauté internationale reliée par la mer. Les experts ont proposé diverses alternatives pour le traitement et le stockage des eaux contaminées. Le Parti social-démocrate s’oppose fermement au déversement d’eau contaminée dans l’océan.
Alors que le PLD vient de remporter une nouvelle fois le pouvoir, ces quelques questions/réponses donnent un clair aperçu des idées qui traversent la société japonaise toujours très conservatrice. En dépit de ses positions ouvertement réactionnaires et anti-sociales, le PLD semble arriver à maintenir le pouvoir indéfiniment. Ceci s’explique par plusieurs phénomènes :
– La société japonaise est vieillissante. La génération du baby-boom est particulièrement connue par ses positions conservatrices et ses rejetés des nouvelles idées, notamment en matières d’égalité sexuelle ou de minorités. Celle-ci tente de protéger ses acquis économiques et à ralentir tout partage des richesses vers les jeunes générations qui, paradoxalement, finance les pensions. Souffrant d’une démographie en berne, cette tranche de la population est la plus nombreuse dans l’archipel et donc la plus influente en politique.
– Et si cette disparité démographique n’était pas suffisante, les jeunes japonais, peu nombreux, ne votent pas ou très peu. L’abstention liée à l’âge est écrasante, les médias et la culture encouragent très peu les jeunes à réfléchir à leur avenir. Pour ces élections, le taux de participation est estimé à moins de 20% dans l’archipel. Ceci permet donc aux plus âgés de décider de l’orientation politique du pays en toute tranquillité.
Rappelons que nous avons sélectionné 6 questions représentatives sur les 43 posées. Nous vous invitons a aller faire un tour sur le site de l’initiative citoyenne afin d’examiner les autres points qui relèvent bien souvent des mêmes disparités idéologiques. Nous espérons que ce coup d’œil dans le monde politique japonaise vous donneront quelques clés de compréhension des enjeux électoraux, mais aussi des différents courants politiques et de leur impact sur le pays et son fonctionnement actuel ou passé. De quoi donner quelques explications sur cette impression d’observer un pays à la fois moderne et bloqué dans le passé sur bien des points, notamment en matière de droits des femmes. Grâce à ces éléments, nous vous laissons le soin de tirer des conclusions basées sur votre propre matrice de lecture et sensibilité politique.
Gilles CHEMIN & Mr Japanization