Construits à partir du 16e siècle, à une époque où les différents seigneurs du Japon étaient en guerre, les châteaux japonais ont désormais perdu leur rôle défensif, mais continuent de veiller sur de nombreuses villes et de faire le bonheur des touristes. Découverte des 13 châteaux les plus incontournables du Japon.

On oppose souvent les châteaux « d’origine », c’est-à-dire qui possèdent toujours leur donjon principal d’époque, à ceux qui ont été détruits, à cause de la modernisation ou de la Seconde Guerre mondiale, puis reconstruits. Si la puissance historique des châteaux d’origine est indéniable, les châteaux reconstruits sont souvent tout aussi fascinants et populaires. D’ailleurs, voici une liste, non exhaustive, des plus beaux châteaux japonais à voir !

Le château d’Himeji trône sur la ville moderne du même nom (@Ann Hung Flickr)

Les châteaux japonais

Appelés shiro (城) , les châteaux japonais furent construits pendant une période de troubles politiques et militaires, appelée Sengoku (戦国時代). Cette période commença vers le milieu du 15e siècle, lorsque l’autorité du pouvoir central faiblit, et se termina à la fin du 16e avec l’arrivée consécutive des trois unificateurs du Japon : Oda Nobunaga, Toyotomi Hideyoshi et Tokugawa Ieyasu.

Des fortifications existaient déjà au Japon, mais c’est réellement pendant cette période que des châteaux imposants ont émergé. Ainsi, bon nombre de ces châteaux n’ont pas servi en temps de guerre et eurent seulement un rôle dissuasif.

Un château japonais comprend en général la structure suivante : un donjon principal, appelé tenshu 天守 (ou tenshukaku 天守閣), protégé par des murs d’enceinte et des douves, mais aussi par différentes tours, appelées yagura 櫓, situées à différents endroits du mur d’enceinte.

Certains châteaux possèdent un donjon secondaire, c’est le cas par exemple du château de Matsumoto. Le donjon est situé dans ce qu’on appelle le « cercle de défense principal » du château, honmaru 本丸, mais il y avait aussi souvent un second cercle défensif, appelé ninomaru 二の丸. Les seigneurs ne vivaient pas dans le donjon et faisaient souvent construire un palais à proximité pour y résider. Quant aux samouraïs, ils vivaient dans des quartiers proches du château, mais à l’extérieur.

Vous remarquerez que le sommet des châteaux donne l’impression d’avoir des cornes, c’est parce que de chaque côté du toit se trouve une statue, souvent dorée, à l’effigie d’une créature ressemblant à un poisson : le shachihoko (鯱鉾). Cette créature, qui possède une tête de tigre et un corps de poisson, a pour but de protéger les châteaux des incendies.

Le château d’Inuyama, qui fait partie des donjons d’origine et des trésors nationaux japonais (@Martin Grill Flickr)

Châteaux d’origine vs châteaux reconstruits

On différencie souvent les châteaux d’origine, dont le donjon principal n’a pas été détruit depuis l’ère Meiji, de ceux qui n’ont pas eu cette chance et qui ont dû être reconstruits. Les douze donjons d’origine sont les suivants : les châteaux de Hirosaki, de Matsumoto, de Maruoka, d’Inuyama, de Hikone, d’Himeji, de Matsue, de Bitchû Matsuyama, de Marugame, de Matsuyama, d’Uwajima et de Kôchi. Parmi ces 12 donjons, 5 font même partie des trésors nationaux du Japon : ceux d’Himeji, de Matsumoto, d’Inuyama, de Hikone et de Matsue.

Pourquoi de nombreux châteaux furent détruits ? Pour deux raisons principales : la première est liée à l’ère Meiji (1868-1912), qui met fin au système féodal. Les châteaux sont alors perçus comme archaïques et associés au système des samouraïs qu’il faut à tout prix abolir. Le gouvernement fait alors réquisitionner de nombreux châteaux et va, soit détruire certains éléments comme les murs ou les tours, soit aller jusqu’à détruire les donjons. La seconde raison principale est due aux raids aériens des Américains lors de la Seconde Guerre mondiale. Certains de ces donjons furent reconstruits, mais dans des matériaux plus résistants, comme le béton, alors que les donjons d’origine étaient principalement fabriqués en bois.

Le château de Matsumoto et les Alpes japonaises en fond (@Daigo Harada Flickr)

1. Château de Matsumoto : un donjon d’origine et un trésor national

Situé dans la préfecture de Nagano, le château de Matsumoto (松本城) fut construit au 16e siècle. Vu de l’extérieur le donjon semble posséder 5 étages, mais il y en a en réalité 6 à l’intérieur, car il y en a un de caché. L’élément central du château de Matsumoto est composé de 5 structures : le donjon principal, un second donjon plus petit et trois tours.

Il faillit être détruit par le gouvernement de Meiji, mais fut sauvé par les habitants qui réussirent à le racheter pour qu’il appartienne à la ville. On trouve désormais à l’intérieur du château des armes et armures, ainsi qu’au dernier étage une vue incroyable sur toute la ville et les Alpes japonaises.

Le majestueux château d’Himeji, le plus grand du pays (@K.Yano Flickr)

2. Château d’Himeji : donjon d’origine, inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco et trésor national

Situé dans la préfecture de Hyôgo, le château d’Himeji (姫路城), surnommé le « héron blanc » pour sa forme et sa couleur, est le plus grand château du Japon. Les premières fortifications datent du 14e siècle, puis le château fut progressivement agrandi entre 1581 à 1618 à la demande de Toyotomi Hideyoshi, l’un des trois unificateurs du Japon.

L’enceinte du château d’Himeji est immense et comprend pas moins de 83 bâtisses. Les murs extérieurs sont enduits d’une épaisse couche de plâtre blanc, très résistant, qui lui donne cette couleur blanche. Le donjon principal du château, de 6 étages, est accompagné de plusieurs tours.

Le château d’Himeji n’a jamais été détruit, il a même échappé de justesse aux bombardements de la Seconde Guerre mondiale qui ont frappé la ville en 1945. Il fut restauré récemment, entre 2010 et 2015.

Le château d’Ôsaka, qui fut reconstruit en 1997 (@Arissa Hahn Flickr)

3. Château d’Ôsaka : reconstruit en 1997

Situé dans la préfecture du même nom, le château d’Ôsaka (大阪城) est le premier château de cette liste à ne pas être d’origine. Il fut construit en 1583 à la demande de Toyotomi Hideyoshi, sur les restes d’un temple qui avait été détruit par Oda Nobunaga. À l’époque, il s’agissait du plus grand château du pays et Toyotomi Hideyoshi voulait en faire le centre du Japon.

Quelques années après la mort d’Hideyoshi, c’est au château d’Ôsaka qu’eut lieu la bataille entre les troupes de Tokugawa et d’Hideyori, le descendant d’Hideyoshi. Hideyori fut défait et le château brûla dans l’incendie en 1615. Bien que reconstruit, le château fut à nouveau touché par un incendie en 1665, puis à nouveau en 1945 par les raids aériens américains. La version que l’on peut admirer de nos jours date de 1997 et fut reconstruite principalement en béton.

Le château d’Okayama, le « château du corbeau » (@DanAke Carlsson Flickr)

4. Château d’Okayama : reconstruit en 1966

Situé dans la préfecture d’Okayama, le château d’Okayama (岡山城) fut terminé en 1597. Il est lui aussi, comme le château de Matsumoto, surnommé le château du corbeau pour sa couleur noire. Seulement le mot utilisé pour corbeau n’est pas le même : le château de Matsumoto est surnommé « karasu-jô » et celui d’Okayama « u-jô ». On appelait même le château d’Okayama le « kin u-jô », le « château du corbeau doré », car il avait des tuiles dorées à l’époque.

Pendant l’ère Meiji, lorsque le château devient la propriété du ministère de la guerre, les douves sont comblées et les murs démantelés. Le donjon principal du château, de 6 étages et qui avait été épargné, fut finalement détruit en 1945 par les frappes aériennes américaines. Le château fut ensuite reconstruit en 1966 et c’est à son pied que l’on trouve le célèbre jardin japonais, le Kôrakuen.

Le château de Gujô-Hachiman, situé sur les hauteurs (@Hisanori Flickr)

5. Château de Gujô-Hachiman : reconstruit en 1933

Situé dans la préfecture de Gifu, le château de Gujô-Hachiman (郡上八幡城) est un yamashiro, c’est-à-dire un château construit sur les hauteurs. Il fut construit sur le mont Hachiman, dans la ville de Gujô, en 1559.

Le château de Gujô-Hachiman n’échappa pas au mouvement de destruction initié par le gouvernement Meiji et son donjon principal fut même détruit. Il fut néanmoins reconstruit assez tôt, dès 1933.

« Il fait partie des châteaux dits dans le ciel « tenkû no shiro », populaire auprès des touristes »

Comme il est situé en hauteur, il est parfois plongé dans une mer de nuages : ce type de châteaux, appelés châteaux dans le ciel « tenkû no shiro », est extrêmement populaire auprès des touristes. Le plus connu est le château de Takeda, situé dans la préfecture de Hyôgo, mais il ne reste quasiment que des ruines de ce dernier. Parmi les châteaux dans le ciel, on trouve aussi le château de Bitchû Matsuyama, qui fait partie des châteaux d’origine.

Le château de Matsue, un château qui ne connut pas la guerre (@Daniel Flickr)

6. Château de Matsue : donjon d’origine et trésor national

Situé dans la préfecture de Shimane, le château de Matsue (松江城) fut construit de 1607 à 1611. Surnommé le « château noir », le château de Matsue fut pensé pour la guerre et était entouré de plusieurs murs d’enceinte. Comme la paix et la stabilité furent de retour au début du 17e siècle, le château de Matsue ne connut finalement pas d’affrontements.

Si le donjon principal échappa à la destruction de l’ère Meiji, ce ne fut pas le cas des autres bâtiments du château.

Le château d’Inuyama, surplombant le fleuve Kiso (@Alexandre Nishizaki Flickr)

7. Château d’Inuyama : donjon d’origine + trésor national

Situé dans la préfecture d’Aichi, le château d’Inuyama (犬山城) fut construit en hauteur et surplombe le fleuve Kiso. Le château donne l’impression de veiller sur la ville d’Inuyama, située à ses pieds, tel un chien de garde. Après tout, Inuyama signifie littéralement la montagne du chien.

Le château d’Inuyama se dispute avec le château de Maruoka le titre du plus vieux donjon du pays encore debout. Il semblerait que ce soit celui d’Inuyama qui soit considéré actuellement comme le plus ancien. La construction du château, dont le donjon principal contient 4 étages, commença en 1440 et se termina en 1537.

Le château de Hirosaki, très populaire au moment de la floraison des sakura (@tez guitar Flickr)

8. Château de Hirosaki : donjon d’origine

Situé dans la préfecture d’Aomori, le château de Hirosaki (弘前城) fut construit entre 1609 et 1611. Son donjon principal, de 6 étages à l’origine, fut détruit assez bêtement dans l’explosion d’une réserve de poudre.

Il fut reconstruit en 1810, mais avec seulement 3 étages. Comme il fut reconstruit avant l’ère Meiji, son donjon est bien considéré comme faisant partie des donjons d’origine. Autour du château, on trouve le parc de Hirosaki, connu pour ses nombreux sakura.

Le château de Hikone, sauvé de la destruction par l’empereur (@uptonia Flickr)

9. Château de Hikone : donjon d’origine et trésor national

Situé dans la préfecture de Shiga, le château de Hikone (彦根城) fut construit entre 1603 et 1622 par le clan Ii, qui occupa le château jusqu’à la fin de l’époque féodale en 1868. C’est une longévité assez rare.

Il aurait normalement dû être détruit à l’ère Meiji, mais il fut sauvé grâce à l’intervention de l’empereur qui tomba sous son charme ! Son donjon, de seulement 3 étages, a pour particularité de mélanger plusieurs styles architecturaux, ce qui en fait l’un des trésors nationaux du pays. Depuis le château, on a également une vue imprenable sur le plus grand lac du Japon : le lac Biwa.

Le château de Kumamoto, qui a malheureusement subi le tremblement de terre de 2016 (@Marjan Flickr)

10. Château de Kumamoto : encore en reconstruction

Situé dans la préfecture du même nom, le château de Kumamoto (熊本城) fait partie des 3 plus beaux châteaux du Japon, avec ceux d’Himeji et de Matsumoto. S’il apparaît seulement maintenant dans la liste, c’est parce qu’il a malheureusement subi de lourds dégâts lors du tremblement de terre de 2016 qui eut lieu dans la région.

Les premières fortifications du château remontent à 1467, mais il fut réellement terminé en 1601. Le château fut assiégé en 1877 et lourdement endommagé par des incendies pendant la rébellion de Satsuma (rébellion des derniers samouraïs contre l’empereur).

Depuis 2021, il est à nouveau possible de découvrir le donjon du château, mais il reste encore de nombreux travaux.

Le château de Maruoka, l’un des plus anciens donjons du pays (@chee_hian Flickr)

11. Château de Maruoka : donjon d’origine

Situé dans la préfecture de Fukui, le château de Maruoka 丸岡城 fut construit en 1576, ce qui en fait l’un des plus anciens. Il est surnommé le « château du brouillard », car selon la légende dès qu’un ennemi cherchait à attaquer le château, un épais brouillard envahissait l’enceinte du château.

Le donjon principal a subi des dégâts lors d’un séisme en 1948, mais fut réparé avec les matériaux d’origine. De nos jours, pour accéder aux différents étages à l’intérieur du donjon il faut monter des escaliers très raides, à l’aide de cordes.

Le château d’Aizu Wakamatsu et ses tuiles rouges (@Scott Shaw Flickr)

12. Château d’Aizu Wakamatsu : reconstruit en 1965

Situé dans la préfecture de Fukushima, le château d’Aizu Wakamatsu (会津若松城) est assez ancien puisqu’il fut construit en 1384. Malheureusement il fut détruit en 1878, après avoir résisté tout un mois, lors de la guerre de Boshin (rébellion des samouraïs contre le tout nouveau gouvernement de Meiji).

Le château est aussi connu sous le nom de château de Tsuruga et fut reconstruit en béton en 1965. Les tuiles du toit du château ont pour particularité d’être de couleur rouge, ce sont les seules tuiles de cette couleur parmi les châteaux japonais.

Le château de Matsuyama construit en hauteur (@worldsafariphoto Flickr)

13. Château de Matsuyama : donjon d’origine

Situé dans la préfecture d’Ehime, le château de Matsuyama (松山城) fut construit en 1603 sur les hauteurs du mont Katsuyama (132 mètres). Le donjon principal devait être de 5 étages, mais fut finalement construit avec 3 étages.

Il fut détruit dans un incendie en 1784, mais comme il fut reconstruit vers 1850 il est considéré comme faisant partie des donjons d’origine. Même s’il échappa aux destructions de l’ère Meiji, de nombreux bâtiments du château furent détruits pendant la Seconde Guerre mondiale.

Comme il fut construit en hauteur, le deuxième cercle de défense (ninomaru) était situé au pied du mont Katsuyama. Le ninomaru contenait le palais de résidence des seigneurs du domaine.

Hikonyan, la mascotte de la ville d’Hikone (@puy Flickr)

Aussi, lors de vos visites, risquez-vous de tomber sur des personnes habillées en samouraïs, mais aussi sur des mascottes adorables…

Il existe, sinon, quantité d’autres châteaux qui valent la peine d’être visités et de figurer dans cette liste… d’ailleurs si cette liste ne vous suffit pas, sachez qu’il existe aussi une liste officielle de la Fondation des châteaux japonais des « cent châteaux japonais remarquables » 日本百名城 (nihon hyaku-meijô).

– Claire-Marie Grasteau


Image d’en-tête : Le château de Matsumoto qui se reflète dans ses douves (@Pablo Fernandez Flickr)