Peut-être avez-vous déjà vu une ou plusieurs photos de David Bowie séjournant au Japon. Il est en effet de notoriété publique que la star internationale était un véritable amoureux du pays du soleil levant. Mais à quel point ? Portrait.
La culture japonaise fut une immense source d’inspiration pour David Bowie, notamment au début de sa carrière… L’occasion de revenir ensemble sur les grands événements de cette relation.
David Bowie : premier contact avec le Japon
David Bowie, David Robert Jones de son vrai nom, est un célèbre chanteur britannique. Né à Londres en 1947 et décédé en janvier 2016 à New York, il était aussi auteur-compositeur et acteur. La chanson qui l’a vraiment fait connaître du grand public est Space Oddity, sortie en 1969. Parmi ses nombreux succès on peut également citer Heroes, Let’s dance ou encore Life on Mars ?
« Je crois qu’en dehors de l’Angleterre, c’est le seul endroit où je pourrais vivre »
Comme beaucoup d’artistes, avant de devenir une immense star, David Bowie a eu du mal à faire démarrer sa carrière. Prêt à abandonner, il décide finalement dans les années 1960 de suivre des cours de mime et de danse auprès de Lindsay Kemp, un chorégraphe et mime. David Bowie et Lindsay Kemp vont alors entamer une relation et c’est par son intermédiaire qu’il va découvrir certains aspects de la culture japonaise, qui déferle au même moment sur la capitale anglaise, comme le cinéma.
Cette rencontre marque le point de départ d’une relation amoureuse avec le Japon, à tel point que David Bowie déclarera en 1973 « Je crois qu’en dehors de l’Angleterre, c’est le seul endroit où je pourrais vivre » lors d’un entretien paru dans le magazine britannique Melody Maker.
David Bowie et le Kabuki
Alors qu’il suit toujours des cours auprès de Lindsay Kemp, David Bowie va rencontrer deux personnes qui vont l’initier à l’art du Kabuki (歌舞伎) : Toru Takemitsu, un compositeur japonais, et l’acteur de Kabuki Tamasaburo Bando V.
Le Kabuki est l’une des formes du théâtre traditionnel japonais, caractérisée par son côté épique. Les différents thèmes des pièces sont d’ailleurs souvent liés à des drames historiques. Les scènes sur lesquelles sont jouées les pièces de Kabuki permettent l’ajout de nombreux effets visuels : plateaux qui tournent pour changer rapidement les décors ou encore trappes pour faire apparaître/disparaître des acteurs.
Une autre particularité du Kabuki est que les acteurs sont exclusivement masculins, ainsi même les rôles féminins, appelés Onnagata, sont joués par des hommes. C’est cet aspect androgyne, ainsi que le maquillage que porte les acteurs, qui va attirer l’attention de David Bowie. Grâce à l’acteur de Kabuki Tamasaburo Bando V, il va alors apprendre l’art du maquillage du Kabuki, qu’il utilisera pour créer son alter ego Ziggy Stardust.
Outre le maquillage, David Bowie va également s’inspirer des techniques théâtrales du Kabuki comme celle du Hayagawari. Cette technique permet de changer de vêtements très rapidement et il est le premier artiste occidental à l’utiliser. Grâce à cette technique, l’acteur porte sur ses vêtements une autre couche de vêtements qui est tenue par des fils, qui sont ensuite tirés par des assistants, afin de l’enlever rapidement et de révéler ainsi la tenue qui se trouvait en dessous.
Inspiré par le Japon de la tête aux pieds
Si le Kabuki a beaucoup inspiré David Bowie, il va aussi avoir un véritable coup de foudre artistique pour Kansai Yamamoto, un designer japonais. Il paraît même que c’est en feuilletant un magazine qu’il tombe sur une de ses créations qui inspirera sa célèbre coiffure.
La modèle qui posait pour lui sur la photo portait en effet une perruque rousse inspirée du Kabuki, oui encore ! C’est comme ça qu’il eut l’idée de se faire cette crinière rousse flamboyante qu’on lui reconnaît tant. Il va par la suite entrer en contact avec le designer et lui demander de confectionner plusieurs tenues pour ses spectacles.
Parmi les tenues créées par Kansai Yamamoto, celle connue sous le nom de « Woodland creatures » fut utilisée par David Bowie lors d’une représentation de Ziggy Stardust. Cette tenue est inspirée des motifs utilisés par les yakuza. On peut également parler de la fameuse cape blanche avec des Kanji. La lecture de ces Kanji permet d’obtenir le nom de David Bowie prononcé à la japonaise. Enfin, une autre de ces tenues extrêmement connues s’intitule « Tokyo Pop ». Cette tenue, immortalisée par le photographe japonais Masayoshi Sukita, est inspirée du hakama, le pantalon traditionnel japonais qui était notamment porté par les samouraïs.
Les créations de Kansai Yamamoto ont permis à David Bowie d’exprimer son caractère androgyne comme il le désirait. Le designer japonais déclarera d’ailleurs que David Bowie a su « casser les tabous sexuels les uns après les autres ». Il faut dire que si de nos jours nous sommes habitués à voir des artistes fluides, dans les années 1970 ce n’était pas commun.
Parmi les artistes japonais qui ont côtoyé David Bowie, on a brièvement évoqué le nom du photographe Masayoshi Sukita. Si les photos de David Bowie prises par Masayoshi Sukita n’ont pas vraiment de lien avec le Japon, ce dernier l’accompagna tout de même pendant plus de 40 ans. C’est à lui que l’on doit par exemple la photo qui fut utilisée pour la pochette de l’album Heroes. La photographie s’est faite au Japon, alors que David Bowie y était avec Iggy Pop.
C’est aussi à lui que nous devons les magnifiques photos prises de David Bowie lors de son séjour au Japon en 1980 pour le tournage d’une pub de whisky.
Hormis le look, c’est aussi dans sa musique que l’on retrouve l’influence du Japon. Des références y sont faites dans plusieurs titres, comme par exemple dans Moss Garden (Jardin de mousse). Ce titre fait clairement référence aux jardins de mousse que l’on peut trouver dans l’ancienne capitale du Japon, Kyôto. C’est également dans ce titre que l’on peut entendre David Bowie jouer du Koto, un instrument traditionnel japonais à cordes pincées, souvent joué comme accompagnement dans les représentations de Kabuki.
La forte influence du Japon dans la carrière de David Bowie va par la suite ralentir. Le dernier grand événement notable est la sortie du film japonais : Furyo de Nagisa Oshima en 1983, dans lequel David Bowie joue le rôle de Jake Celliers, un soldat britannique fait prisonnier pendant la Seconde Guerre mondiale. C’est en effet la même année que sort le nouveau succès de David Bowie : Let’s Dance. Il en a désormais fini avec le côté androgyne, les cheveux roux et l’inspiration japonaise.
David Bowie fait partie de ces nombreux artistes inspirés par la culture japonaise, si riche. Même si cela n’a duré qu’un temps, le personnage de Ziggy ou les tenues incroyables de Kansai Yamamoto font partie des moments les plus mémorables de sa carrière.
– Claire-Marie Grasteau
Image d’en-tête : David Bowie et Kansai Yamamoto (à gauche) / tenue réalisée par Kansai Yamamoto (à droite), par Masayoshi Sukita