C’est un phénomène né des États-Unis et qui commence à se développer en France depuis quelques années ; une nouvelle forme d’habitat nommé « Tiny House » soit en français : micro-maison. Mais quel est le lien avec le Japon ? S’il semble flou à première vue, il apparait qu’en fait ce mouvement a puisé une bonne partie de son inspiration dans un minimalisme architectural purement japonais et son esthétisme du dépouillement. Et c’est l’architecte à l’origine des premières tiny qui l’affirme…
L’idée des Tiny House n’est pas récente, elle remonte aux années 70-80 où va naître une volonté de vivre en marge de la société marchande. Mais c’est récemment que le mouvement a connu un essor dans les années 2000 aux États-Unis grâce à l’architecte Jay Shafer qui a fait connaitre sa société spécialisée dans la vente Tiny House sur roues, proposant des modèles standards, personnalisables ou encore des plans pour construire soi-même sa micro-maison.
C’est après les désastres causés par l’ouragan Katrina de 2005 que l’existence des Tiny Houses a touché un public plus large, des réfugiés préférant acquérir une Tiny House plutôt que d’habiter dans un FEMA trailer, ces sortes de mobile home low-cost que le gouvernement américain avait mis à disposition des victimes pour les reloger temporairement. L’intérêt pour les Tiny House s’est par la suite renforcé avec la crise financière des subprimes de 2008 qui a vu nombre de familles perdre leur logement dont elles ne pouvaient plus rembourser le crédit et se tourner vers ces maisonnettes sur roues. Et pourtant, ceci n’explique pas tout.
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Une Tiny House se distingue d’un camping-car classique par son agencement qui reproduit une maison en bois miniaturisée d’une surface allant d’une trentaine de mètres carrés à près de quatre-vingt dix. Si des catastrophes économique et climatique ont été à l’origine de leur développement en occident, d’autres facteurs ont su séduire les acheteurs et les Tiny House sont devenues un mouvement social et mondial à part entière. La simplicité des micro-maisons a en effet attiré les amateurs de minimalisme et leurs possesseurs revendiquent une philosophie de vie plus libre, plus simple et détachée des considérations matérielles tout en se préoccupant de l’environnement.
Jay Shafer, l’initiateur des Tiny House aux USA, a récemment avoué avoir trouvé son inspiration dans la culture japonaise. Et en effet, on peut sans mal rapprocher le concept des Tiny House d’une branche particulière de l’architecture japonaise, le « Kyôshô jûtaku » ou le « micro-foyer » qui va prendre son essor au Japon dans les années 90. La nécessité d’optimiser au maximum l’espace a toujours été une préoccupation au Japon, pays composé à 70% de montagnes ou forêts, et dont une importante partie de la population se retrouve concentrée en ville où les prix des loyers atteignent en conséquence des sommes folles. Et cette tendance s’est renforcée au début de la récession économique du pays d’où l’émergence du Kyôshô jûtaku.
Les architectes ont alors rivalisé d’ingéniosité pour créer des maisons agréables à vivre malgré leur petite superficie en se servant notamment de l’espace vertical pour démultiplier la surface habitable. Si de l’extérieur ces maisons paraissent exigües, en pénétrant à l’intérieur le visiteur est toujours fortement surpris par l’habitat spacieux que cette étroitesse dissimule, pour un coût énergétique quasi-nul de surcroît. Par ailleurs, cette architecture fusionnait parfaitement avec le mode de vie minimaliste adopté par nombre de japonais. Nombre d’entre eux vivent avec le stricte minimum d’objets nécessaires pour vivre, dans une logique de simplicité de d’apaisement mais aussi de style.
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Ainsi, on peut superposer à cette architecture une philosophie de vie que les Japonais nomment « le courant Danshari ». Le Danshari représente un art de vivre japonais qui met l’accent sur le détachement par un nouveau rapport aux objets et un recentrement sur soi. Danshari se décompose justement en trois mots « dan » = refuser ; « sha » = jeter ; « ri » = se détacher. Une combinaison qu’il faut comprendre dans un sens aussi bien matériel (savoir se contenter du minimum, donner le superflu) que spirituel (s’arracher aux contraintes de la société). Cet « art du rangement » est devenu un modèle au niveau international pour les plus minimalistes. Un ouvrage francophone livrant les clés de cette pensée existe d’ailleurs pour celles et ceux qui souhaiteraient s’y initier.
Pour l’avoir expérimenté moi-même au Japon, le fait de vivre dans un petit espace, couplé à une quelconque volonté écologique, pousse l’individu à vivre de ses expériences plutôt que par les objets matériels. C’est une autre perspective, et donc sentiment, qui s’ouvre à nous. Mais également une plus grande quiétude et sérénité (en dépit du cliché du salaryman tokyoïte hyper-stressé). Basé sur des problématiques et un sens de l’esthétique profondément japonais, il est intéressant de remarquer à quel point un concept architectural a su se répandre discrètement à travers le monde, popularisant et englobant les Tiny House dans un mouvement de revendication à la fois sociale, économique et écologique. Preuve s’il en est des influences bénéfiques que la culture japonaise peut véhiculer de manière universelle.
S. Barret
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Sources : woody-way.com / littlethings.com / gizmodo.com