Il faut croire que mère nature a décidé de donner à certains de ses enfants une force et volonté de vivre hors du commun. Après le Ginkgo d’Hiroshima, voici un Bonsaï de la ville qui fête ses 392 ans cette année !
Après le bombardement de Hiroshima par les Américains en 1945, la région s’est retrouvée dévastée, et les Japonais la croyaient perdue pour quelques décennies, voire quelques siècles. Cependant, une partie de la végétation a voulu leur redonner espoir plus tôt que prévu. Il y a eu d’abord ce Ginkgo vieux de 200 ans dont nous vous avions parlé dans un article précédent. Néanmoins, il n’est pas le seul végétal à avoir survécu, symbolisant la survie et l’espoir : un Bonsaï planté en 1625 subsiste toujours.
Ce dernier fut mis en pot quand, plus tôt dans la même année, la famille Yamaki décida de prendre en charge la santé des bonsaïs au Japon. Leur petite infirmerie à bonsaïs se tenait à 3km de l’épicentre de l’explosion. Pourtant, ce vieil arbre a réussi à survivre sans trop de dégâts en dépit de la puissance de la frappe et des retombées radioactives. Il faut tout de même rappeler que cette catastrophe a tué près de 75 000 personnes, laissant une cicatrice profonde, toujours perceptible aujourd’hui, dans le cœur des Japonais.
Cet arbre était considéré comme une véritable relique et témoin du passé par la famille Yamaki. C’est pour cela qu’en 1976, Masaru Yamaki décida d’offrir symboliquement ce survivant à l’Arboretum national des États-Unis, ainsi que 53 autres bonsaïs, célébrant le bicentenaire du pays. En donnant cet arbre qui avait passé plus de six générations dans leur famille, les Yamaki voulaient ajouter une symbolique puissante au présent fait au pays qui imposa la paix et le pacifisme dans l’archipel.
« L’arbre est heureux ici, c’est pour cela que je pleure »
Quatre ou cinq ans après cet échange, Masaru Yamaki se rendit aux États-Unis pour rendre visite à cet arbre qu’il porte en estime. Le conservateur de l’époque raconta qu’une fois en face de l’arbre, il se mit à pleurer à chaudes larmes, rendant son interlocuteur légèrement mal à l’aise. Il dut faire appel à des traducteurs pour lui demander si tout allait bien. Sa réponse fut : » oui, l’arbre est heureux ici, c’est pour cela que je pleure « .
Il est incroyable de voir le lien qui a pu unir le bonsaï avec le monde qui l’entourait, à savoir avec la famille qui s’est occupée de le cultiver et aujourd’hui les nombreux visiteurs du centre. Certains iraient jusqu’à croire que l’amour que l’on accorde aux plantes les rend plus résistants aux épreuves de la vie ! Même à une attaque nucléaire meurtrière…
L’attention que les Japonais accordent aux bonsaïs relève de plusieurs dimensions. Premièrement, leur capacité à vivre près de 500 ans leur offre un rôle d’héritage dans les familles. Celui-ci se transmet de génération en génération, comme dans le cas de la famille Yamaki. L’arbre survit à celui qui lui offre son amour et témoigne de l’existence des différents membres d’une lignée. L’importance de la tradition n’est évidemment pas à sous-estimer chez les Japonais.
De même, il existe autant de bonsaïs qu’il existe d’arbres (car oui, bonsaï signifie « plante en pot », il s’agit uniquement d’une technique de culture et non d’un arbre en particulier). Ainsi, chaque bonsaï possède sa propre manière d’être cultivé, leur permettant de profiter d’une attention omniprésente et d’une culture riche. Enfin, les bonsaïs sont considérés comme de véritables sculptures vivantes au Japon, si bien que de nombreux musées leur sont consacrés : à Tokyo, le Takagi Bonsai Museum abrite l’un des bonsaïs les plus vieux du monde. Il aurait été planté en 1500 !
Si vous avez l’occasion, passez à la Kokufu Bonsai Ten de Tokyo. On dit qu’elle est la plus prestigieuse exhibition de bonsaïs au monde. Rendez-vous dès février au Tokyo Metropolitan Art Museum pour en savoir plus !
– S.Grouard
Cet arbre vieux de 1400 ans offre un spectacle doré saisissant
Sources : boredpanda.com / wikipedia.org / parlonsbonsai.com