Pourquoi ne pas délaisser les habituels chemins touristiques bondés pour une découverte à bord des trains japonais ? Tout à la fois beaux, singuliers et redoutablement ponctuels, ils participent de la notoriété du pays. Une réputation particulièrement méritée dans la magnifique préfecture du Kansai, région de l’ancienne capitale Kyoto, de Nara avec ses cerfs kawaii ainsi que de la très active Osaka. Pour traverser ainsi les temps, les villes, les âges, les territoires, les trains atemporels japonais s’imposent naturellement et offrent, à cet effet, de larges vitres panoramiques ouvertes sur l’Histoire et les cultures. Poulpy s’était d’ailleurs déjà fait l’écho.

Et pour (re)découvrir les hauts lieux de cette région riche culturellement et historiquement, pas moins de trois itinéraires vous tendent les bras. Pour chacun sont décrits les lieux d’importance traversés par la ligne (les archiconnues Nara, Osaka, Kyoto mises à part), pour qu’ainsi chaque voyageur puisse choisir son parcours selon où le portent ses attentes et sa curiosité !

Premier itinéraire : le réseau Keihan, de Otsu à Uji

Par les lignes de Keihan on traverse en partant de Kyoto, puis Osaka et d’Otsu dans la préfecture de Shiga ainsi que le mont Hieizan. Le train touristique “HIEI” de la ligne Eizan, est reconnaissable à son vert profond. Il relie le nord de Kyoto passant par ses montagnes boisées, et mène au sanctuaire de Fushimi Inari Taisha célèbre pour ses mille torii et de là on accède au quartier des geishas de Gion et au sanctuaire Kiyomizu-dera. Le parcours se termine par la ville d’Uji, célèbre pour son matcha (thé vert).

À 10min de Kyoto se trouve Otsu, et bien que sa proximité avec la capitale culturelle du Japon tende à l’éclipser la ville mérite qu’on s’y attarde pour ses trésors historiques. Otsu est justement connue pour ses temples et sanctuaires – certains parmi les plus beaux du Japon – inscrits à l’Unesco. Située à la pointe sud du lac Biwa (le troisième plus vieux lac du monde et le plus grand du Japon) c’est une ville spirituelle et culturelle qui a été capitale du Japon durant cinq ans, au VIIe siècle. Elle offre un accès facile à la nature, à de nombreuses activités aquatiques ainsi qu’à une gastronomie de qualité. L’étendue du lac Biwa permet d’y faire des croisières.

Le Michigan, célèbre bateau à aubes, sur le lac Biwa.

Au sommet du mont Hieizan se trouve le temple Enryaku-ji, temple majeur du bouddhisme japonais, inscrit au patrimoine mondial de l’humanité depuis 1994. Construit en 788 par Saichô (fondateur de l’école Tendai), ce temple était constitué d’une centaine de bâtiments mêlés aux cèdres millénaires surplombant le lac Biwa. Près de l’Enryaku-ji, un quartier s’est créé pour accueillir les moines durant leur retraite du temple.

Ce quartier nommé Sakamoto abrite donc cinquante habitations de moines à l’atmosphère unique et préservée ouvertes aux visites. Autres temples à découvrir, le grand complexe du Mii-dera fondé au VIIème siècle à voir au moment du Hanami et le Ishiyama-dera dont la construction remonte à 762 et où Murasaki Shikibu aurait commencé la rédaction du Dit de Genji au XIème siècle.

Le temple Ishiyama-dera.

Au sein de la ville d’Uji se trouve le temple du Byôdô-in, trésor national, fondé en 1052. C’est dans son cadre que où se déroule l’histoire du Dit de Genji. Ville reconnue pour son thé, sa production à Uji a débuté très tôt au XIIIème siècle alors que le thé est arrivé au Japon au XIIème siècle. Ce matcha réputé fut aimé par les seigneurs de toute la nation à toutes les époques comme celles d’Oda Nobunaga et Toyotomi Hideyoshi au XVIème siècle. Les maîtres de thé Sen no Rikyu et Furuta Oribe, épris de ce thé, y ont établi la culture japonaise du thé avec la célèbre cérémonie du thé, “Cha no Yu».

-> Renseignements pour les tickets de train (liens en anglais)

Le pass touristique de Kyoto-Osaka (1 ou 2 jours) : Il s’agit d’un bon plan pour circuler sur la ligne Keihan uniquement et pour aller de Kyoto à Osaka.

Le Kyoto-Osaka sightseeing pass (Greater KURAMA & KIBUNE area / 1day)
Il s’agit d’un bon plan pour circuler sur les lignes Keihan et Eizan pour aller de Kyoto à Osaka, en passant par Kurama et Kibune sans restriction et limite durant les jours de validité du pass. Le pass est aussi valide pour le train HIEI.

Deuxième itinéraire : le réseau Kintetsu, vers Yoshino

Avec les trains de Kintetsu s’ouvre l’accès au sud du Kansai, d’Osaka à Nagoya. Le train “Blue Symphony” relie avec une touche rétro les villes d’Osaka, Kyoto, Nara et Yoshino en proposant des cabines privées confortables et en préservant l’harmonie entre histoire, culture et nature le temps d’un voyage.

Chaque année, au début du mois d’avril, il est un spectacle auquel le Japon et le Kansai plus particulièrement, invite. Il s’agit évidemment du Hanami qu’on ne présente plus. La floraison des cerisiers se contemple notamment dans le cadre exceptionnel du Kofu d’Ishibutai. Ce tertre funéraire, jadis tumulus de Sogo no Umako, célèbre aristocrate du VIème siècle, offre une lumière unique sur sa soixantaine cerisiers légendaires. A la nuit tombée, de mars à avril, les reflets de la lune sur les cerisiers vous transportent dans un autre monde, un monde où l’imaginaire est roi.

Cerisiers en fleurs sur le mont Yoshino.

Le mont Yoshino comprenant la ville éponyme est aujourd’hui inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco. Ce lieu d’une beauté à couper le souffle a vu la naissance d’une religion respectueuse de la nature, le bouddhisme Shugendô. Un festival en l’honneur de la riziculture se tient chaque 3 avril au sanctuaire Yoshino Mikumari à Kami-senbon. Les trente mille cerisiers ornant les 600 mètres du mont Yoshino en sont témoins et lui offre un cadre poétique. Chaque année, en prévision de la floraison des cerisiers à Kami-senbon, un Tao (la personne qui plante le riz) dissimulé derrière le masque d’un vieil homme, vêtu d’une robe blanche et accompagné d’un homme à masque de taureau, représente les différentes étapes de la culture du riz dans la salle de culte. Outils à l’appui (houe, charrue, herse, panier,etc.), il offre une cérémonie à la fois légère et solennelle pour célébrer la traditionnelle « moisson des cinq grains » à l’issue de laquelle il distribue les fameux mochi, gâteaux de riz gluant.

Le 11 et 12 avril, une procession religieuse se déroule en pleine floraison des cerisiers sur le mont Yoshino. Elle réunit tant des moines, des ascètes montagnards Yamabushi que des enfants et des croyants. La procession est destinée à accompagner les fleurs de cerisiers jusqu’aux trois grandes statues Zao Gongen du temple Kinpusen-ji pour les prévenir que le printemps est arrivé. Le fondateur du bouddhisme Shugendô, En no Gyoja, y eut une vision qui lui fit créer cette religion. Le 7 juillet, la cérémonie de la fleur du lotus (« renge ») a lieu dans ce même temple. Des fleurs ayant poussées dans l’étang où En no Gyoja prit son premier bain sont offertes aux statues Zao Gongen. Au même moment, on peut assister à un festival unique au monde qui célèbre le saut de la grenouille : un homme déguisé en grenouille est porté par une foule attachée pour le mener au temple Kinpusen-ji afin que le pouvoir du grand prêtre lui redonne une apparence humaine.

La fête du saut de la grenouille.

-> Renseignements pour les tickets de train (liens en anglais)

Le forfait Kintetsu de 2 jours (pour les zones Asuka et Yoshino). La compagnie ferroviaire Kintetsu vend des forfaits qui permettent de voyager autour d’Osaka, Nara et Kyoto à prix raisonnable. Pour seulement 2500 yens pour les deux jours, vous pouvez monter et descendre des trains à Osaka, Kyoto et Nara.

Troisième itinéraire : le réseau Nankai, de Sakai au mont Koya

Entre les stations de Hashimoto et du mont Koya (ou Koya-san), la ligne « Tenku » propose un véritable voyage au milieu des fleurs de ce dernier. Le voyage à allure modérée permet de réveiller ses sens au contact de la nature et de sublimer sa relation au sacré du Koya-san.

Nankai Limited Express to Koyasan (©Nankai Electric Railway)

L’histoire de la ville de Sakai est si ancienne qu’elle remonte au paléolithique. Véritable plaque tournante du négoce internationale, en particulier avec la Chine, le Portugal et l’Espagne, Sakai est appelée la Venise orientale. L’âme culturelle de Sakai se ressent à chaque coin de rue. Si le Japon compte plus de 160 000 tumulus, c’est à Sakai, près du Koya-san, que se trouve l’ensemble de tertres funéraires le plus exceptionnel du pays. Remontant au Vème siècle et inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco, la conservation et la sophistication de « l’ensemble de kofun de Mozu-Furuichi » sont remarquables. En son sein, repose le « Nintoku Tennoryo Kofun », considérée l’une des trois plus grandes tombes du monde avec la pyramide de Khéops et le mausolée aux huit mille statues de l’empereur Qin. Pour visiter dans les conditions les plus douces ce magnifique domaine, des vélos peuvent être loués près du parc Daisen, en face du kofun.

Le « Nintoku Tennoryo Kofun » : le kofun de l’empereur Nintoku à Sakai.

C’est au mont Koya que Kûkai dit « Kôbô Daishi » fondateur du bouddhisme Shingon ouvrit un monastère en 816 où ses prières allèrent à la sécurité du pays et la sérénité de la société. Il en choisit l’emplacement pour la majestueuse nature de la montagne loin de l’agitation de la ville. L’Okuno-in et le Danjo-garan, constituent les principaux lieux sacrés du mont Koya. Le Danjo-garan fut l’un des premiers complexe élevés à Koya-san par Kûkai. On y trouve une vingtaine de temples et bâtiments, dont la grande pagode « Konpon Daitô ».

Lieu de pèlerinage pour le mausolée de Kûkai, l’Okuno-in, lui, est principalement un immense cimetière : de nombreuses pierres tombales, monuments et tours commémoratifs y invitent à la contemplation dans un silence respectueux. Aujourd’hui encore, le mont Koya est un lieu spirituel vivant où, depuis 1200 ans, des moines pratiquent, où des croyants de toutes obédiences prient, le temple étant régi par une ouverture à toute religion.

À n’en pas douter, les lignes locales de trains japonais ne manquent jamais de surprendre, d’autant plus quand elles nous emmènent loin des tracés touristiques habituels des grandes villes comme Kyoto. Conquis ? Faites nous part de vos expériences à votre retour…

Le cimetière du Okuno-in. Photographie : Thiémard horlogerie

-> Renseignements pour les tickets de train (liens en anglais)

NANKAI – toutes lignes – Forfait 2 jours : trajets illimités une carte pour 2 jours. Achat en ligne possible. 2000 yens par forfait.


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