Nouvelles série japonaise signée Netflix, « Makanai : dans la cuisine des maiko » est une vraie bouffée d’air frais, aussi délicate qu’instructive. Elle nous invite en effet à découvrir le dur mais passionnant apprentissage suivi par les jeunes filles qui veulent devenir maiko.

Makanai : dans la cuisine des maiko est une série développée par Hirokazu Kore-eda, réalisateur des très appréciés Tel père, tel fils, Une affaire de famille ou dernièrement Les Bonnes étoiles. Il s’agit d’une adaptation du manga La Maison des maiko d’Aiko Koyama qui compte déjà 22 tomes au Japon et 2 en France.

Nous y suivons le destin croisé de deux jeunes filles de 16 ans qui ont le même rêve : devenir maiko à Kyoto ! Parties de leur campagne d’Aomori , Kiyo et Sumire se retrouvent dans une okiya (pension où vivent les maiko et geiko) pour y suivre la formation de maiko. Hélas, la première montre très rapidement ses limites et il lui est fait comprendre qu’elle n’a pas les qualités requises pour atteindre son rêve. Ce qui n’est pas le cas de son amie qui, très douée, progresse à toute vitesse. Ne voulant toutefois pas quitter ce monde qu’elle découvre et qu’elle apprécie déjà, Kyoko propose ses services pour devenir makanai, la cuisinière des maiko. Et c’est avec une grande joie que l’on regarde la jeune femme s’épanouir totalement dans ce nouveau rôle qui met en lumière sa plus grande force : sa générosité.

Pour le spectateur, c’est un vrai bonheur de la voir concocter de bons petits plats avec des produits frais qu’elle va chercher chaque jour chez les commerçants du quartier. La série vous donnera envie de découvrir les trésors culinaires de l’archipel, encore plus quand ils sont cuisinés avec autant de fantaisie que notre héroïne. Et si le spectateur est ravi de quasiment sentir ses plats, il sera également bien charmé par l’ambiance de Gion.

Dans le cœur de Kyoto

Makanai : dans la cuisine des maiko est une invitation à découvrir l’envers du décor d’une des plus grandes spécificités du Japon : les maisons de geiko et de maiko. Ici, nous sommes au plus près d’elles et découvrons à quoi peut ressembler le quotidien de ces femmes et de leurs apprenties. Entraînement à la danse, essais de kimonos plus beaux les uns que les autres, séances de maquillage, de coiffure… Rien ne nous est caché même si l’on sent que tout ceci est assez romancé puisque nous n’en voyons surtout que les bons côtés. Une bienveillance permanente règne que ce soit du côté des « collègues » comme de celui des clients, ce qui tranche évidemment avec les témoignages de certaines ex-maiko dans le monde réel. Pas de débordement ici, mais une ambiance feutrée et souriante où les conversations se terminent souvent dans le petit bar du quartier…

Il y a de l’amitié et de l’amour dans l’air, parfois quelques larmes, mais rien de bien méchant. Cette série n’est pas là pour nous proposer un spectacle éprouvant, bien au contraire. C’est une bulle de positivité à regarder avec un thé vert à la main et sous une couverture à la chaleur aussi réconfortante que les épisodes qui s’enchaînent avec une élégance qui fait du bien.

L’esprit de famille

Makanai : dans la cuisine des maiko est en effet une série tout en délicatesse. Une tranche de vie qui se cuisine dans une grande maison pleine de bienveillance. Ici, on est en famille. Les plus âgées se font appeler « Mère », toutes les filles sont sœurs et les hommes sont des frères. On se soutient, on se supporte parfois tant bien que mal mais tout le monde y met du sien pour que la vie en communauté soit la plus simple et saine possible. Il faut trouver le positif partout où il peut se cacher, que ce soit dans le sourire né d’une bonne nouvelle ou dans une saveur inédite que l’on hume d’un nouveau plat de Kiyo. Car, en dehors de l’okiya, la pression est bien réelle.

La danse de la perfection

La vie de maiko et de geiko est en effet aussi belle qu’elle peut être stressante tant seule la perfection est permise à ces jeunes filles. Les mai (danses) doivent être exécutés sans accroc et les formules de politesse et de bienséance sont à apprendre par cœur. Ne pas les retenir peut faire naître le déshonneur sur les jeunes femmes qui se sentent pourtant privilégiées de vivre ce qui, pour certaines, était tout simplement un rêve d’enfant. Dans la série, il y a tout de même une once de légèreté influée par de nombreux personnages.

On pense à la tornade Yoshino (Mayu Matsuoka) qui revient dans l’oyaka après quelques années. C’est un tourbillon de drôleries et d’irrévérence qui n’en oublie pas son rôle premier : divertir le client. Car tel est bien ce que l’on demande aux maiko et aux geiko, souvenir d’un temps ancien qui lutte contre son extinction. À l’image de ce Japon plein de contrastes qui tente de préserver péniblement certaines traditions, et abandonne si facilement d’autres… Être maiko, c’est aussi un contrat avec une réalité alternative qu’il est demandé aux « heureuses » élues d’accepter…

Bagues à part

Il y a toujours un revers au glamour de façade, et ce, quel que soit l’activité. On peut voir ici que c’est également le cas pour les maiko. Déjà, dans leur entraînement aussi exigeant que subtile, mais aussi dans des règles qui peuvent sembler folles de nos jours comme l’interdiction d’avoir de téléphones portables. C’est encore plus flagrant concernant leur rapport avec l’amour. Celles qui acceptent de faire ce métier n’ont en effet pas le droit de se marier si elles veulent le continuer ! Une manière étrange de les garder à vie dans la profession. Alors naît le dilemme qui brise les cœurs de celles, comme la belle Momoko (Ai Hashimoto, vue dernièrement dans le très bon Tempura), dont devenir maiko était un rêve : doit-il se terminer pour qu’enfin soit possible l’amour ? Ce dernier est au cœur de l’intrigue de plusieurs personnages, que ce soit un amour naissant, nouveau, perdu ou retrouvé.

Makanai dans la cuisine des maiko est une série réjouissante et pleine de fraîcheur. On le doit à un casting épatant et lumineux, à commencer par les jeunes actrices éblouissantes que sont Nana Mori et Natsuji Deguchi qui interprètent respectivement Kiyo et Sumire. Les 9 épisodes de cette première saison disponible sur Netflix sont un régal et on n’attend qu’une chose : découvrir les recettes de la suite.

Stéphane Hubert

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