Square Enix n’en finira jamais de nous surprendre avec la sortie de « The Centennial Case : a Shijima Story », un jeu d’enquête en Full Motion Video bien ancré dans les mœurs et la vie japonaise. Sans forcément être passionné de gaming, sa découverte vaut le détour pour les fans du Japon.

Il y a 4 ans, Square Enix goûtait déjà au jeu vidéo en Full Motion Video avec The Quiet Man (l’homme serein) et on peut dire sans trop s’avancer que l’accueil plus que mitigé qu’il a reçu de la part des joueurs et de la presse n’a probablement pas été au niveau des attentes. Et si cet échec aurait pu refroidir l’éditeur japonais à retenter l’expérience, il n’en fut rien, comme on peut le découvrir aujourd’hui avec la sortie de The Centennial Case : a Shijima Story, jeu aussi mystérieux que réussi et à l’intrigue palpitante. Nous avons eu la chance de pouvoir le tester.

Une famille dans la tourmente

Dans The Centennial Case : a Shijima Story, vous êtes plongé dans le quotidien trouble de la famille Shijima. Cette dynastie a en effet connu de nombreux décès inexplicables au cours des cent dernières années. Lorsque Haruka Kagami, une écrivaine de polars, est sollicité par son ami Eiji Shijima à se rendre dans la maison familiale, elle se retrouve malgré elle à enquêter sur quatre affaires de meurtre survenues à différentes époques. Au centre des attentions, le camélia rouge, un tueur en série, et le Tokijiku, un fruit de Jouvence qui offrirait la vie éternelle. La vérité n’est jamais très loin, mais elle ne se laissera pas facilement dévoilée.

Mystère, surprises et fausses pistes…

L’histoire passionnante du jeu est vraiment son point fort puisqu’elle nous ballade de révélations en mystère et de surprises en fausses pistes. Rien n’est jamais aussi simple qu’on pourrait le croire et, au grès des 6 chapitres qui composent l’aventure, notre esprit devient de plus en plus acéré et concentré sur les moindres détails dissimulés dans les dialogues et les décors. The Centennial Case : a Shijima Story se suit comme une série télévisée palpitante et bien écrite.

L’expérience peut d’ailleurs très bien se savourer en spectateurs à plusieurs. Chacun pourra alors partager en direct son point de vue et ses hypothèses. Une chose est sûre : vous ne vous ennuierez pas une seconde sur la quinzaine d’heures que durera l’aventure de cette famille torturée et obsédée par le temps qui passe.

Un Gameplay original

Le jeu développé par Square Enix sort vraiment des sentiers battus, que ce soit dans son approche narrative ou son gameplay. Déjà, il se base sur le principe déjà évoqué plus haut du Full Motion Video, c’est-à-dire qu’il propose de longs moments filmés avec des acteurs en chair et en os dans de vrais décors japonais. Et là où la plupart des productions du genre se contentent de quelques séquences de ce style, The Centennial Case : a Shijima Story s’en montre lui immensément généreux.

C’est simple, vous passerez parfois des dizaines de minutes à regarder votre écran sans toucher votre manette si ce n’est pour faire des choix dans les dialogues d’Haruka afin d’aiguiller les conversations avec les autres protagonistes. Vous pouvez même contrôler les vidéos, les mettre en pause, les faire avancer ou les rembobiner pour ne rien rater de l’intrigue.

Ces séquences sont suivies d’une phase de réflexion durant laquelle vous pourrez mettre à jour toutes les suppositions possibles par rapport à vos indices et aux suspects. Ces moments ressemblent à des puzzles et, aidé des symboles présents sur certains côtés des tuiles, vous devrez les coller au bon endroit. Vous découvrirez alors les différentes possibilités de modus operandi du meurtrier et même souvent certaines un peu farfelues auxquelles vous n’auriez pas songé vous-même.

Vient ensuite le moment de confronter les suspects ! Celui où la vérité doit éclater…et où vous ferez souvent des erreurs. A chaque fois que vous vous tromperez, vous aurez le plaisir d’être les spectateurs de moments très drôles où Haruka se retrouve gênée de s’être complètement loupée dans son raisonnement. L’audience ne manque jamais de se moquer d’elle et d’éclater de rire dans des moments souvent hilarants.

La seule chose qui vous fera moins rigoler, c’est que chaque échec vous renvoie à la phase de réflexion, que vous le vouliez ou non. Vous perdrez donc quelques minutes pour revenir à la délibération de la romancière. Ce n’est pas grand-chose, mais quand ce pas grand-chose s’accumule 5 ou 6 fois de suite, il devient un peu agaçant. Il aurait été pourtant si simple de vous faire juste revenir en arrière de quelques secondes au choix des réponses.

C’est le seul point négatif du jeu au milieu des très nombreux positifs. Car The Centennial Case : a Shijima Story est un vrai bonheur, et ce encore plus pour les amoureux de la culture du Japon.

En immersion

Le jeu est en effet bercé d’une aura 100% japonaise qui sera un régal pour ceux qui s’intéressent à la culture du pays. La famille Shijima est un modèle du genre avec son patriarche tout puissant qui devrait bientôt laisser la tête du clan à un de ses trois fils. Il y a une cérémonie des cerisiers, une autre des lanternes. On visite ryokan et cabaret (comme pour Asakusa Kid) et on s’éternise avec joie dans la grande et sublime maison qui abrite cette dynastie au destin trop souvent marqué par le drame et son beau jardin.

Les décors sont reconstitués avec grande finesse et moultes détails suivant les époques qui sont traversées. Vous aurez souvent envie de mettre pause pour contempler les tenues des personnages et les très beaux kimonos portés par les élégantes et mystérieuses femmes fatales qui peuplent l’univers du jeu.

L’histoire est scénarisée par Yasuhito Tachibana qui a déjà travaillé sur la série Netflix The Naked Director. On sent dans son approche un véritable amour pour les grands noms du polar japonais, que ce soit Erdongo Rampo ou Akimitsu Takagi. L’auteur s’amuse d’ailleurs avec la figure de l’écrivain en parsemant son intrigue de nombreuses références à la profession.

C’est mystique, plein de mystères, teinté d’un brin de surnaturel et on déguste cette aventure autant comme acteur que spectateur.

Casting de choix

Justement, puisqu’on parle d’acteur, on peut dire que le casting japonais ne souffre d’aucune fausse note.  Haruka est incarnée par la pétillante Nami Sakuraba que l’on a pu croiser dans le rôle de Sasha sans les adaptions live de L’Attaque des Titans et qui a prêté sa voix au personnage de Natsuki dans Summer Wars. Elle est très naturelle et souvent très drôle dans ses failles. Moins connu chez nous, le reste de la distribution est très bon avec des performances crédibles et justes, d’autant que chaque acteur et actrice enfile le costume de plusieurs personnages à travers les âges. A noter la présence, dans un rôle secondaire, de Mariko Tsustui, star de L’infirmière et Harmonium, deux films de Kôji Fukada qui ont connu de beaux succès hors des frontières japonaises. Vous pouvez évidemment faire le jeu avec les voix japonaises et les sous-titres français.

En résumé, The Centennial Case : a Shijima Story est une vraie réussite, d’autant plus que personne ne l’attendait vraiment. Ce choix audacieux de l’originalité et de la surprise est à féliciter du côté de Square Enix. On espère secrètement qu’il s’agit ici du premier épisode d’une saga que l’on souhaiterait bien plus longue. D’autres affaires à élucider au Japon en compagnie d’Haruka ? On signe tout de suite !

The Centennial Case : a Shijima Story est disponible depuis le 12 mai sur Switch, PS4, PS5 et PC.

(Nous remercions Square Enix de nous avoir gracieusement envoyé un code pour télécharger la version PS4 complète du jeu).

Stéphane Hubert

PS : Toutes les images de cet article ont été fournies par l’éditeur afin d’éviter les spoilers, ce qui explique les dialogues en anglais qui s’y trouvent.