Film d’animation japonais sorti cet été sur les écrans français, De l’autre côté du ciel est une fable aussi sombre dans son ciel que lumineuse dans son message humaniste et écologique. Une aventure haute en couleurs qui ravira les petits et les grands par son histoire touchante et ses qualités techniques indéniables. Une (re)découverte salutaire alors que la COP 27 vient de s’achever de manière décevante face à l’urgence climatique.

De l’autre côté du ciel est le premier long-métrage de Yusuke Hirota. Il s’agit d’une adaptation du roman Poupelle et la ville sans ciel d’Akihiro Nishino. On y suit Lubicchi, un jeune garçon solitaire qui n’a pas d’amis et travaille comme ramoneur malgré son jeune âge. Depuis la disparition de son père, le jeune garçon doit subvenir au besoin de sa mère malade et handicapée dans ce monde froid et pollué.

Un soir d’Halloween, un cœur tombe du ciel dans la décharge de la ville et donne naissance à Poupelle, un être constitué de morceaux de ferraille et de déchets. Alors qu’il va être brûlé et écrasé dans un compacteur, ce « fantôme » est sauvé pas Lubicchi. Les deux laissés-pour-compte deviennent alors amis de galère, même si c’est au péril de la vie du petit garçon.

De l’autre côté du ciel : le message est passé

Dans la ville où évoluent nos deux héros, le ciel est caché derrière d’imposantes fumées noires qui se dégagent de longues cheminées. L’espoir d’un monde plus lumineux est très maigre et les habitants survivent tant bien que mal dans cette société policée. Les milices y sont constamment à la recherche d’étrangers et de ceux qu’ils appellent « les hérétiques » … Les grains de sable n’ont pas leur place dans cette méga-machine industrielle, considérés comme de potentiels dangers pour les rouages bien huilés de cette dictature vieille de 250 ans.

Dans ce lieu bien sombre, le ciel est tellement enfumé que le monde extérieur en est même devenu une légende. On parle même des étoiles comme d’un mythe. Le thème de l’écologie est évidemment central au long-métrage avec cette pollution omniprésente qui rend toujours plus malades les habitants de la ville, tout en plongeant la cité dans une nuit éternelle.

La désinformation, profitant au système dominant, est également au centre de l’histoire. Ainsi, dans la cité, ce ne serait pas les fumées qui rendraient les gens malades, mais la présence de personnes différentes comme Poupelle, présumées porteuses de bactéries. Cette réalité déformée est répétée jusqu’à plus soif et le film ne se gêne pas pour critiquer certaines modèles de société prêts à toutes les manipulations pour maintenir le statu-quo. C’est néanmoins dans ce monde bien triste que Lubicchi trouve en Poupelle un allié et un ami pas comme les autres.

Tomodachi desu ! (nous sommes amis)

De l’autre côté du ciel est effectivement avant tout un sympathique divertissement pour enfant avec un beau message d’amitié et un engagement profond. Peu importe les différences physiques et les origines, les cœurs qui battent au même rythme se rapprochent et fusionnent sur une même mélodie. Les plus jeunes vont se régaler même si le scénario ne les épargne pas de moments émotionnellement chargés.

Le film n’est certes pas parfait, et certaines scènes frénétiques sont un peu longues et rappellent que le long-métrage vise en priorité un public jeune. Les passages musicaux « à la Disney » auraient également pu être évités, n’apportant pas vraiment de plus-value au long-métrage. Leur présence semble pourtant être aujourd’hui devenue la norme dans de nombreux films d’animation japonais, peut-être pour allonger artificiellement la durée du conte. Au-delà de leur présence, c’est surtout leur qualité qui fait défaut. Stéréotypées dans le style « musique pop d’animé » et sans grande personnalité, elles rentrent par une oreille pour ressortir instantanément par l’autre. Vraiment dommage qu’elles ne soient pas à la hauteur du reste de l’œuvre graphique assez époustouflante.

Néanmoins, comme le personnage de Poupelle, le long-métrage a un grand cœur et de belles valeurs à partager avec les petits comme les grands.

Contrôle technique passé

Le film est tout en 3D et très réussi esthétiquement. Même si l’univers se veut sombre avec cette fumée menaçante, ceux qui le peuplent multiplient les couleurs. Prenant place au départ le soir d’Halloween et profitant de la nuit perpétuelle et de la lueur des néons qui l’illuminent, c’est le prétexte parfait pour multiplier les fantaisies et les teintes arc-en-ciel. Il y a de très beaux panoramas à la poésie presque TimBurtonienne. Comme chez le réalisateur d’Edward aux mains d’argent, les monstres ne sont ici aussi pas ceux que l’on croit.

Studio4°C prouve une fois de plus qu’il est un acteur de l’animation japonaise sur lequel il faut d’ores et déjà compter. En quatre ans, la société japonaise nous a offert Les Enfants de la mer, La Chance sourit à madame Nikuko et ce très sympathique De l’autre côté du ciel. On attend donc leur prochaine production avec impatience.

Stéphane Hubert