Ce qui était il y a encore quelques décennies un rêve futuriste présents dans les œuvres de science-fiction comme Minority Report ou Total Recall sera bientôt une réalité. Une voiture dans laquelle il n’y aura plus de chauffeur, mais seulement des passagers. Une perspective qui apporte son lot de promesses et de craintes… Aujourd’hui, certains prototypes sillonnent déjà les routes des États-Unis et d’Europe. Mais quand est-il du royaume du Kitsch, de l’insolite et qui est toujours à la pointe de la technologie ? La start-up ZMP spécialisée dans le robotique a mené des tests avec l’aide de la société japonaise de Taxi Hinomaru Kotsu, afin de lancer le premier taxi autonome dans les rues de Tokyo.

Somme nous à l’aube d’un Japon futuriste, sillonnés de voitures autonomes, comme imaginé dans les mangas d’anticipation ? Fin août dernier, un taxi Toyota Estima Hybrid, a transporté une famille de trois personnes sur une route de 5,3 km, en partant de la gare Otemachi de Tokyo pour s’arrêter dans le quartier de Roppongi. Spécificité ? Il n’y avait aucun conducteur à bord. Celui-ci est totalement autonome. Une première au Japon qui augure l’arrivée des véhicules sans conducteur à court terme, avec une volonté de généraliser le concept.

Le premier taxi autonome en question :

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Ce véhicule fonctionne donc de manière totalement autonome : il tourne, change de voie et s’arrête tout seul, même si – pour l’instant – une personne doit rester assise face au volant en cas d’urgence. Les voitures autonomes mises en circulation dans un cadre expérimental sont équipées de capteurs, couplés à un système de GPS, qui peuvent détecter des obstacles tels que des panneaux de signalisation, les piétons et autres véhicules. Avec l’arrivée sur le marché de super-processeurs permettant une vitesse de calcule record, la technologie gagne en efficacité mois après mois. Quelles que soient les conditions météorologiques, ces dispositifs fonctionnent de jour comme de nuit et permettront à terme au véhicule de se conduire en autonomie, sans intervention humaine.

Pour le moment, le taxi de la société Hinomaru Kotsu ne fait que quatre allers-retours par jour. Les réservations s’effectuent en ligne via une application pour smartphone. Pour un aller-simple, le tarif du voyage coûte 1 500 yens, soit 12 € environ. Le projet est en partie financé par le gouvernement métropolitain de Tokyo et se poursuivra jusqu’au 8 septembre prochain.

Présentation du taxi autonome

Pour les phases de test encore en cours, un conducteur est toujours présent dans le véhicule pour des raisons de sécurité évidentes. La majorités des fabricants de voitures autonomes insistent d’ailleurs sur le fait que ces véhicules doivent toujours se trouver sous la supervision consciencieuse d’un conducteur, qui peut en reprendre le contrôle à n’importe quel moment, surtout en cas de danger. Car à ce point du développement de la technologie, il s’agit principalement de faciliter la conduite et non de la remplacer encore. Mais à terme, on peut estimer l’humain à bord ne sera plus qu’une option. La société ZMP vise à commercialiser d’autres taxis autonomes lors des prochains jeux olympiques et paralympiques qui vont se tenir à Tokyo en 2020. Avoir un service de voiture autonome opérationnel aux J.O pourrait inciter d’autres pays à faire de même, en ce qui concerne les grands événements mondiaux à venir.

Kazutaka Tomita, président et chef de direction de la société de Taxi Hinomaru Kotsu, a déclaré qu’ils sont confrontés à un grave problème de manque de main-d’œuvre. Les voitures autonomes apparaissent donc comme un moyen de remédier à cette pénurie de conducteurs à Tokyo, mais aussi à la demande croissante de taxis parmi les visiteurs étrangers au Japon. Le pays du soleil levant veut privilégier la robotisation afin de pallier à la baisse de la population active, conséquence de la baisse de la natalité qui frappe le Japon depuis des décennies. L’exploitation des nouvelles technologies et de la robotique permet aussi d’éviter pour les autorités d’avoir recours à l’immigration, une solution qu’ils rechignent à envisager sauf sous des conditions drastiques et de manière très limitée.

Selon l’entreprise ZMP, autre avantage serait que les véhicules autonomes devraient réduire le coût des services de taxi et les rendre accessibles à un public plus large. De plus, la demande devrait augmenter avec l’afflux des touristes pendant les Jeux Olympiques d’été en 2020, ils sont donc une solution tout à fait appropriée en plus de dévoiler au monde l’avancée technologique du Japon dans le domaine. Le cas échéant, les taxis moins coûteux peuvent aider à faire face aux pénuries de transport public dans les zones reculées où de nombreuses sociétés de taxis ont cessé leurs activités en raison du vieillissement des conducteurs et du problème à leur trouver des successeurs.

Mais les recherches autour du véhicule autonome intéressent aussi d’autres pays et des entreprises y ont réalisé des progrès très importants en la matière. Uber, Waymo et la filiale de la société mère de Google, Alphabet, ont testé des voitures autonomes dans plusieurs villes américaines. Waymo devrait d’ailleurs déployer sa flotte de robots taxis dans les prochains mois. Le constructeur automobile allemand Daimler prévoit également de lancer l’année prochaine des taxis autonomes en partenariat avec la société d’ingénierie automobile Bosch en Californie. Divers développements ont également été réalisé en Chine. Didi Chuxing, le géant Chinois des véhicules de tourisme avec chauffeur, a testé des voitures autonomes sur des routes publiques, tandis que le moteur de recherche Baidu envisage un lancement d’un service de robots bus dans le pays et compte s’associer de suite avec SB Drive, une filiale de SoftBank Group, pour lancer ce dernier au Japon, début 2019. Pour revenir au Japon, citons enfin le constructeur automobile japonais Nissan, qui, en partenariat avec la firme Japonaise DeNA, se prépare notamment à accueillir ses propres taxis autonomes à Yokohama au Japon en mars prochain, dans un essai prévu sur 15 jours Une opération baptisée « Easyride » où deux modèles de Nissan Leaf électrique seront aménagés à l’occasion pour transporter des volontaires.

https://www.youtube.com/watch?v=QjPUnAt3PSA

Toutefois, avant d’en arriver à la généralisation sur les routes de taxis ou voitures de particuliers autonomes, les chercheurs ont encore des problèmes à résoudre, touchant à la sécurité des passagers et des piétons qui croiseront la route de ces véhicules. En mars dernier le logiciel d’une voiture autonome Uber en phase de test a ainsi bien détecté la présence d’une cycliste traversant une route mais l’a tout de même percutée, causant sa mort. L’explication tient au fait que le logiciel l’avait confondu avec un obstacle « faux-positifs ». Il s’agit d’obstacles comme des feuilles volantes ou des sacs plastiques qui, détectés par les capteurs, n’entraînent pas le freinage du véhicule. Une erreur de programmation dans la tolérance aux obstacles du logiciel sur laquelle vont devoir se pencher les ingénieurs pour garantir que ce type d’accident ne se reproduise pas. Autre problème : si le véhicule était bien en conduite autonome, une personne se trouvait aussi derrière le volant et cette dernière n’a rien fait pour éviter la collision. Pensait-elle que la voiture allait évidemment s’arrêter ? N’a-t-elle compris trop tard que non ? C’est là une autre faille qui pointe : la confiance de l’Homme en la technologie qui n’est pas infaillible.

Mais cette confiance aveugle en la technique ne risque-t-elle pas de se retourner contre nous ? Pour cause, derrière les conséquences positives de l’automatisation affichées par les grandes marques, il se cache également des enjeux strictement économiques. Pour cause, ce qui coute le plus cher dans un taxi traditionnel : c’est précisément l’Humain. Au yeux du capitalisme, le facteur humain a toujours été cette écharde douloureuse dans le pied de l’investisseur, d’où cette course à l’efficacité permettant de réduire le nombre d’effectifs pour une productivité accrue. Certes, tout semble être fait pour que le « cout du travail » – le terme étant lui même orienté – soit réduit à son paroxysme, laissant à l’individu tout au mieux de quoi survivre. Avec l’automatisation, le capital peut assurer son investissement à 100%, la machine ne réclamant ni salaire ni congé.

Certes, se libérer du labeur peut sembler une belle chose de prime à bord, tant que chacun peut subvenir à ses besoins. Cependant, dans le système actuel où la répartition des richesses est profondément inégalitaire, la « robotisation » signifiera qu’un capital privé pourra générer d’avantage de profits sans jamais devoir passer par la case « redistribution » (par le travail). Sans intervention collective pour redistribuer cette richesse, un appauvrissement général au profit d’une petite minorité de sociétés possédantes est la seule issue possible. On peine encore à imaginer un Mcdo, une usine Ikea ou Uber sans aucun travailleur, tout au mieux un technicien de maintenance. Pourtant, nous y allons tout droit, pour le meilleur, comme pour le pire…

A. Mekkaoui


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Sources : asia.nikkei.com / newsrule.com / theverge.com