Diffusée en 2017 au Japon, « Quartet » nous est enfin proposé en France, sur Netflix notamment. À l’époque de sa diffusion dans l’archipel, la série avait connu un joli succès et, aujourd’hui, nous comprenons pourquoi… Musique, amitié et mystère teintent la trame d’un show porté par un casting de haute volée. Une douce mélodie qui nous a envoûtés de la première à la dernière note.

Nouveau drama japonais disponible sur Netflix après Famille en flammes, Quartet est une série réalisée par Nobuhiro Doi, Toshio Tsuboi et Fuminori Kaneko.

On y suit les trentenaires Beppu, Maki, Iemori et Suzume qui se rencontrent par hasard en sortant tous les quatre en même temps de différentes salles d’un karaoké. Les trois premiers sont violonistes et la dernière est violoncelliste. Pourquoi ne pas monter un groupe ? La conversation débute dans un bar et se termine par la création du Quatuor Trou de Donut. Dans les esprits de ces quatre laissés-pour-compte, s’animent de nombreuses questions existentielles. Des interrogations que tous les artistes se posent un jour, mais pas seulement…

Doit-on poursuivre son rêve de vivre de la musique ou en faire un simple hobby ? Qu’est-ce que l’amour dans un couple marié ? Comment se montrer à la hauteur dans une famille dont les membres côtoient les sommets ? Les anciennes blessures cicatrisées peuvent-elles s’ouvrir à nouveau quand les chocs du présent les aide à refaire surface ? Le Quartet sait qu’il n’existe qu’un remède à tous ces maux : la musique. Par contre, elle ne peut pas répondre à l’interrogation d’un problème plus circonstanciel : où est passé le mari de Maki ?

Dépassés mais bien présents

Dans le Quartet, chaque membre possède un passé, si ce n’est à cacher, au moins à (faire) oublier. Beppu est ainsi le fils d’un célèbre chef d’orchestre. Iemori a eu une carrière d’acteur dans des films de série B. Suzume et Maki ont elles aussi vécu des événements traumatisants que nous nous garderons bien de vous révéler ici… Balbutiant dans les allées d’un destin qui ne les épargne pas, on leur fait ainsi comprendre que leur vie n’est pas conventionnelle, en particulier au Japon. Pire encore, on met leur talent de musiciens en doute, leur signifiant qu’ils sont de troisième rang. Alors pour mettre derrière eux ces expériences douloureuses, ils jouent de la musique.

Et quand les cordes vibrent à l’unisson, tout autour semble disparaître. Les uns sans les autres, ils se sentent pourtant inutiles et insignifiants. Unis, enfin, ils existent. Les quatre finissent même par habiter ensemble dans la maison de campagne du grand-père de Beppu à Karuizawa. Dans ce cocon boisé et réconfortant, loin de l’énergie déstabilisante de Tokyo, ils se sentent en sécurité, se soutiennent et se protègent du monde extérieur. Les cœurs en harmonie, ils avancent soudés dans les méandres de l’existence et partagent alors les aventures simples de la vie, même si celle-ci ne sont pas toujours de tout repos.

Quand le Quartet change de tempo

Quartet est composé de 10 épisodes et, pourtant, même si nous sommes sur un format série, on la ressent différemment. Le rythme des différentes intrigues nous met en effet plus face à plusieurs films que l’on nous proposerait les uns après les autres. On y retrouve nos mêmes héros, mais ce qui les fait avancer pendant 2-3 épisodes est différent des précédents. Même le genre change, flirtant avec les histoires de meurtres, les enquêtes policières, l’étude de mœurs, la romance ou tout simplement la comédie.

Cette structure aussi peu ordinaire que ses personnages peut dérouter, mais une fois les premières minutes passées, on replonge avec plaisir dans la nouvelle vague qui va emporter nos musiciens souvent au bord de la noyade. Pourtant, malgré ce côté mélancolique assumé, une surprise nous attend : la série japonaise se montre également très drôle. L’interprétation au diapason des différents membres du groupe y est, il faut bien le dire, pour beaucoup.

Une partition jouée parfaitement

Quand le casting se compose d’acteurs talentueux, un quatuor est en effet parfait pour donner naissance à des scènes comiques au rythme de mitraillette. Et les personnages s’en donnent ici à cœur-joie, surtout ceux d’Iemori et de Suzume, brillamment incarnés respectivement par Issei Takahashi (Les Amants sacrifiés) et Hikari Mitsushima (Love Experience). Le premier a le chic pour trouver des théories fumeuses et oublier de porter un caleçon. La deuxième est lunaire et s’endort n’importe où. Craquante et reine des petites phrases mignonnes, elle exprime par exemple sa joie en clamant haut et fort qu’elle se sent « mizomizo ». Les écouter parler autour d’une table à l’heure du repas est un régal pour nos oreilles amusées.

Maki (Takako Matsu vue dans Confessions), sous un sourire de femme au foyer parfaite et délicate, s’enlise aussi parfois dans des discours dont le sens n’est pas toujours très clairs. Citons pour exemple « Les gens qui pleurent en mangeant survivent toujours. » (une référence à Chihiro et son onigiri?). Mais son calme apparent n’en fait qu’un personnage encore plus mystérieux. Reste Beppu (Ryûhei Matsuda croisé dans Avant que nous disparaissions), plus en retrait, mais c’est le rôle qui veut ça, lui l’amoureux transis et dont la position de fils de famille riche l’empêche de se montrer plus tête en l’air que ses camarades.

Autour d’eux, des personnages secondaires bien écrits font avancer l’histoire avec brio. On pense notamment à Kiyoko (Masako Motai), la belle-mère de Maki, aussi rêche que suspicieuse et concernée par la disparition de son fils. Mention spéciale à Alice, la serveuse diabolique et manipulatrice du restaurant « Nocturne », interprétée avec une folie douce par Riho Yoshioka. Sa malice vous vaudra de nombreux éclats de rire.

Quartet est une jolie série sur quatre personnes perdues qui se retrouvent et se réconfortent dans la musique autant par amour pour cette dernière que par l’amitié qu’ils ont créée autour.

Les 10 épisodes qui la composent sont d’ores et déjà disponibles sur Netflix.

Stéphane Hubert