Le prix de l’immobilier est très élevé au Japon ainsi que le coût de la vie en particulier dans les grandes métropoles. Toutefois il existe un moyen d’acquérir ou de louer un logement à un prix très en deçà du marché, il ne faut juste pas redouter la présence éventuelle d’esprits ! Vous trouvez ça drôle ? C’est pourtant une réalité bien concrète au Japon et un phénomène qui porte même un petit nom…

Le phénomène porte le nom de « jiko bukken » (事故物件) : il s’agit d’un logement où le précédent occupant a trouvé la mort de manière tout sauf naturelle : empoisonnement au gaz, suicide, meurtre principalement mais aussi négligence, disparition suspecte… Rentrent aussi dans cette catégorie : les logements utilisés par des gangs criminels, construits au-dessus d’un puits, d’un cimetière, sur le terrain d’un ancien culte religieux ou ayant subi des avanies (incendie criminel, inondation) qui rendent le lieu impur. La liste est donc bien longue !

Ces informations, le vendeur se doit de les spécifier au futur propriétaire à la condition que l’accident ait eu lieu dans les 10 ans avant la vente. Au Japon, on ne plaisante pas avec cette démarche, c’est une obligation inscrite dans la loi. Pas question de tenter de la dissimuler ou de la contourner, la vente pourrait alors être annulée. Dans le cas d’une maison, on préfère parfois la démolir pour revendre le terrain, comme c’est d’ailleurs généralement le cas dans l’archipel (les maisons sont voulues peu résistantes au temps). À la campagne, ces maisons ont parfois tendance à être abandonnées.

Autre situation qui rebute les bailleurs : louer à une personne âgée isolée. Ils redoutent en effet que cette dernière décède chez elle et qu’on ne découvre son cadavre que plusieurs jours voire semaines plus tard. Dans un pays où plus d’un quart de la population a plus de 65 ans (en 2050 ce pourcentage montera à 40% !) c’est un risque à prendre en compte. Nous avions d’ailleurs illustré la problématique entière du Kodokushi au Japon : le fait de mourir seul dans l’indifférence. Mais ce sont les meurtres qui restent le plus craints des propriétaires malgré une criminalité relativement faible au Pays du Soleil Levant.

En effet, les gens superstitieux craignent que le logement soit hanté par l’esprit du défunt, revenu du royaume des morts pour se venger ou tourmenter les vivants. Et dans un pays où la culture des yôkai – bienveillants ou maléfiques – est très développée, autant dire que cette perspective fait reculer bon nombre de Japonais ! Ils ont aussi peur des dégâts qui pourraient témoigner de l’histoire du lieu comme des marques de sang, bien que les techniques de nettoyage et de rénovation soient perfectionnées et qu’aucune trace ne subsiste. Suite à un évènement tragique, il arrive même que de simples voisins décident de déménager.

Les agences aussi détestent avoir ce genre de biens dans leur catalogue et souhaitent s’en débarrasser le plus rapidement possible. En 2011, le nombre de propriétés concernées était estimé à 2,2 millions, un chiffre stable depuis près de dix ans. Mais avec l’augmentation en flèche de l’âge de la population, il est à craindre que de nombreuses personnes décèdent chez elles dans les années à venir.

En conséquence de quoi la valeur d’un logement peut baisser de 30 voir 50% et le loyer se réduit dans les mêmes proportions pendant une à deux années, une aubaine que certaines personnes finissent par saisir malgré la peur ressentie. Et pour apaiser les éventuels esprits, une « cérémonie de purification » peut être commandée par les nouveaux habitants. Une option rentable par rapport à l’économie réalisée. D’ailleurs, depuis quelques années, on observe un nouveau plébiscite de ces logements par des personnes ayant des moyens limités. La nouvelle génération est peut-être également moins proche des vieilles superstitions. Cette situation particulière ne concerne que les premiers occupants à s’installer dans le « logement maudit ». Par la suite, on considère que la malédiction est rompue et le prix du bien retrouve les standards du marché.

Gare à la vengeance des fantômes !

Sur internet, il est possible de consulter un site qui répertorie les « jiko bukken » dans le monde entier soit pour les éviter, soit pour profiter d’une bonne affaire si toutefois vous ne craignez pas les fantômes !


Sources : ozy.com / tokyocheapo.com / japantoday.com / japanpropertycentral.com