L’artiste japonaise contemporaine Miho Hirano donne naissance à des aquarelles de jeunes filles aux chevelures fleuries. Dans ses peintures à l’huile, la femme est source de toutes les fertilités. Mère de la fleur, berceau du végétal, elle accueille la floraison jusqu’à s’en faire l’incarnation. Dans l’œuvre de Miho Hirano, la chevelure occupe une part centrale, en tant que théâtre de la fusion de la femme avec la faune et la flore. Décryptage d’une ode à la féminité, et au printemps.

Dans l’œuvre de Miho Hirano, il est principalement question de féminité et de sensualité. La femme est envisagée dans une fusion féconde avec le monde végétal et le règne animal. L’harmonie de l’ensemble naît d’une palette de couleurs pastel, qui crée une sensation de paix et de sérénité.

Source : mihohirano.mystrikingly.com

Attribut érotique et quasi divin, les chevelures sont un élément majeur dans l’œuvre. Les cheveux volent dans tous les vents, flottent avec une légèreté aérienne. Les mèches envolées barrent les visages. La souplesse et la légèreté des cheveux ont quelque chose de céleste.

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Les chevelures, élaborées et habitées, sont incarnées. Elles prennent vie de manière quasi distincte de leurs propriétaires, au point d’être érigées au rang de personnages à part entière du tableau. L’importance de la chevelure trouve ses racines dans la culture japonaise ancestrale. Chez les samouraïs, les sumos ou encore chez les geishas, la chevelure, la coiffure et les accessoires occupent une fonction symbolique. Dans les cultures asiatiques, les chevelures détachées sont signe de jeunesse et de désinhibition. Sombres, les cheveux sont associés à la fleur de l’âge ; blancs ou grisés, ils indiquent l’âge avancé ; noués en tresses, ils sont un signe de modernité.

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Les chevelures sont des terreaux fertiles où éclosent les fleurs. La floraison est un élément central dans la culture japonaise, un symbole de beauté et de fragilité, d’une impermanence qui sublime. Les fleurs jaillissent et se répandent dans les chevelures luxuriantes, ornent ou nouent les cheveux. Parfois elles deviennent des branches, qui voient éclore les bourgeons, puis les fleurs. Alors les branches se confondent avec les chevelures dans des ensembles à l’apparence désordonnée, mais dont les courbures, en réalité, ne doivent rien au hasard.

En plantant des herbiers au cœur des chevelures, Miho Hirano décline tout un inventaire floral : fleurs de cerisiers, de pruniers, camélias, coquelicots, pissenlits, pâquerettes, clématites, orangers trifoliés, œnothères roses…

D’autres fois, ce sont des éléments filaires – guirlandes ou entrelacs de rubans – qui s’inscrivent dans la continuité des lignes des cheveux, là où les lampions des guirlandes viennent rompre les lignes par des points.

Au centre de tous les ornements, les visages nacrés cachent un torrent d’émotions. Les yeux mi-clos, les regards pensifs et les mentons tournés vers le sol disent la mélancolie ; les bouches droites ou entrouvertes suggèrent une réflexion, sinon une gravité. Traversés par une impénétrable rêverie, les visages gorgés de jeunesse révèlent une maturité d’esprit.

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Quant aux yeux, ils sont cerclés de rose. Ces touches de fard égayent les visages et en soulignent l’élégance. Mais les halos rosés laissent aussi transparaître une tristesse qui peut s’étirer jusque sur les pommettes. Ils sont alors le réceptacle de larmes prêtes à perler.

Dans l’univers de Miho Hirano, la figure féminine est parée d’atours floraux et végétaux, d’enroulements de tiges et de branchages formant des lignes courbes. L’artiste exploite ainsi le thème de la femme-fleur, cher à l’Art nouveau occidental. Certaines toiles ont même un petit air d’Alfons Mucha. Mais l’œuvre est aussi bercée de symboles et de thèmes japonais : fleurs de cerisiers, papillons, carpes koï, esthétique de bijin-gai, emprunts des chevelures élastiques à l’univers du manga… Enfin, par leur forme ovale et leurs décolletés en dentelle, certains portraits rappellent les camés.

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Miho Hirano met en scène ses muses, nymphes ou déesses avec des accessoires ou sur des arrière-plans discrets mais non moins évocateurs : pinceaux ouverts en éventail, kilt, parquet, balles de tennis… Les arrière-plans ne doivent rien au hasard, dans l’harmonie ou le contraste. Harmonie, quand les replis du tissu et la rondeur des balles répondent aux courbures des mèches dans le vent ; contraste, quand les lignes droites du manche de pinceau ou des lattes de parquet en sont l’antithèse. Les tonalités gris-bleu-vert donnent aux compositions une dimension surréaliste ou fantastique, dans laquelle l’esthétique et la poésie ont toute leur place.

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Originaire d’Abiko, petite ville de la préfecture de Chiba, dans le Grand Tokyo, Miho Hirano a étudié la peinture à l’université d’Art de Musashino à Kodaira, près de Tokyo. Elle a participé à de nombreuses expositions collectives. Mais sa carrière de peintre a atteint une dimension internationale en 2017, lors d’une grande exposition solo à la Corey Helford Gallery de Los Angeles.

Les coups de pinceau sont doux mais nets. L’artiste commence à esquisser des croquis au crayon, avant d’appliquer une fine couche de teinture bleutée. Puis une seconde touche de peinture à l’huile donne les tonalités d’ensemble et les ombres.

L’artiste puise le thème de la fusion entre la femme et la nature dans le soin que sa mère portait aux plantes. Elle semble aussi réservée et silencieuse que ses créations. La peinture est son mode d’expression, sa tribune pour exprimer son regard sur la femme et, plus généralement, sur le monde.

Les portraits éthérés de Miho Hirano mettent au centre une féminité douée de fertilité. Ils expriment le processus de floraison, de maturation et de changement propre à chaque végétal, chaque fleur, chaque être humain. Au royaume de l’impermanence, où tout est en constante évolution, chaque stade de développement du vivant égrène des beautés éphémères. L’œuvre de Miho Hirano est profondément enracinée dans la culture japonaise de la beauté sublimée par son caractère éphémère. Une parenthèse enchantée dans un univers où la féminité, dans sa puissance comme dans ses fragilités, a quelque chose de divin.

Source : mihohirano.mystrikingly.com

Pour poursuivre la découverte des œuvres de Miho Hirano, rendez-vous sur son compte Instagram.

Marie Borgers

Sources et liens utiles

https://mihohirano.mystrikingly.com/

https://www.instagram.com/mihohiranoart/

https://www.facebook.com/miho.hirano.5621

https://www.artistup.fr/articles/1240/l-arrivee-du-printemps-avec-miho-hirano

https://beautifulbizarre.net/2018/02/15/hair-and-hirano/

Source : https://mihohirano.mystrikingly.com/

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